Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τ. Δ΄

Τίτλος:Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τ. Δ΄
 
Τόπος έκδοσης:Κέρκυρα
 
Εκδότης:Εταιρεία Κερκυραϊκών Σπουδών
 
Συντελεστές:Κώστας Δαφνής
 
Έτος έκδοσης:1984
 
Σελίδες:364
 
Θέμα:Ο Καποδίστριας στην Ελβετία
 
Τοπική κάλυψη:Ελβετία
 
Χρονική κάλυψη:1813-1814
 
Περίληψη:O τέταρτος τόμος του ΑΡΧΕΙΟΥ ΚΑΠΟΔΙΣΤΡΙΑ καλύπτει, την αποστολή του Καποδίστρια στην Ελβετία το 1813-1814, που είχε για στόχο την απόσπασή της από τη γαλλική κηδεμονία και την ενότητα και ειρήνευση της χώρας, που θα εξασφάλιζε ένα Σύνταγμα κοινής αποδοχής. Ο Καποδίστριας πέτυχε στην αποστολή του αυτή και η επιτυχία απέσπασε την εκτίμηση και την εμπιστοσύνη του Αυτοκράτορα της Ρωσίας και άνοιξε το δρόμο για τη μετέπειτα λαμπρή σταδιοδρομία του.
 
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Il paraît conséquemment que les transactions dont on va s’occuper à Vienne devront d’abord tendre à faire manquer toutes ces alliances en préparant celles qui seront les plus conformes au système politique que la Russie veut embrasser.

Ce système ne semble guère pouvoir être fondé dans un moment où les plus grands états du continent vacillent sur leurs bases, et où l’Angleterre est dans le plus haut degré de sa puissance. Ce n’est que le temps qui pourra donner la mesure de la stabilité de la Constitution française et des succès des différentes branches des Bourbons. Ce n’est que le temps et l’incertitude de l’avenir qui peuvent faire manquer les projets de l’Autriche sur l’Italie et sur le midi de l’Allemagne. Ce n’est que le temps et l’incertitude de l’avenir qui peuvent tenir en respect des gouvernements illibéraux envers leurs peuples, qui peuvent conserver le bon esprit des nations souhaitant un meilleur sort, qui peuvent rendre efficace et salutaire l’influence de l’Empereur Alexandre. Ainsi reculer à un terme éloigné la stipulation des transactions finales entre les Souverains réunis à Vienne paraîtra être la mesure la plus utile aux intérêts de la Russie.

On sent en avance que ces vœux peuvent être incompatibles avec les circonstances et contraires aux conventions et arrangements antérieurs.

S’il était possible de les réaliser en partie ce serait encore un avantage. L’Allemagne doit avoir une constitution. Peut-être le sort de la Pologne doit-il être décidé.

Pourquoi ne mettrait-on pas sur la même ligne les intérêts généraux de la navigation et du commerce et pour celui de la Russie en particulier le libre passage par la mer Noire dans l’Adriatique et dans la Méditerranée. Les affaires de l’Orient seraient entamées par cette dernière ouverture et l’Angleterre et l’Autriche forcées de dévoiler leur politique à l’égard de la Porte. Les négociations relatives à tant d’objets importants ne pourraient certainement être achevées ni à Vienne ni en peu de temps ni sous l’inspection immédiate des souveranis.

Ainsi en séparant les questions, en décidant pour le moment celles qu’on peut considérer comme fondamentales, on pourrait remettre toutes les autres à un congrès général qui s’ouvrirait dans une petite ville d’Allemagne et qui dans l’espace de quelques années, pacifierait l’Europe. C’est de cette manière qu’on gagnerait tout le temps que pourrait exiger la composition d’un grand système politique pour la Russie, et cet intervalle servirait utilement à rassembler les notions indispensables pour baser solidement ce vaste édifice [...].

Pour réaliser ces desseins, Capodistrias suggère à l’empereur d’utiliser les membres des Légations russes à l’étranger.

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Louis Fauche-Borel

Il faut ajouter à ces rapports une troisième lettre à l’empereur, datée du 29 août/10 septembre1 et accompagnant une supplique du Neuchâtelois Fauche-Borel. Ce libraire, père de famille tranquille, fidèle sujet du roi de Prusse, s’était trouvé jeté au cours de la Révolution dans le parti monarchiste français et était devenu l’un des agents les plus actifs et téméraires de Louis XVIII, servant d’intermédiaire auprès des généraux Pichegru et Moreau, puis du directeur Barras, que les royalistes avaient eu l’espoir de faire basculer successivement dans leur camp. L’échec du mouvement royaliste du 4 septembre 1797 et surtout le coup d’Etat du 18 Brumaire 1799 qui porta Bonaparte au pouvoir et entraîna la chute de Barras, déjouèrent ces plans. En 1814, Fauche-Borel est toujours en possession des lettres patentes signées par Louis XVIII à Mittau en 1799 pour Barras, lettres dont il envoie copie à l’empereur Alexandre. Le libraire neuchâtelois a passé plusieurs années à la prison du Temple, il s’est entièrement ruiné pour la cause du roi et il attendra —en vain, il faut bien le dire— dès la Restauration, la récompense de ses services. Il publiera quatre volumes de Mémoires pour expliquer ses déboires et finira par se suicider en 1829.

Ce qu’il voudrait d’Alexandre en septembre 1814, c’est une marque de satisfaction. Par les dédales tortueux des collections d’autographes, la lettre que Capodistrias écrit à Fauche-Borel (Document n° 76) pour l’avertir qu’il a transmis sa demande à l’empereur, se trouve aux Archives du Collège Calvin de Genève! On peut se demander si Capodistrias aurait été aussi aimable dans ses termes s’il avait su que Fauche-Borel s’était chargé peu de temps auparavant de transmettre au prince-régent de Grande-Bretagne un mémoire des Bernois, plaidant leur cause en s’opposant au plan établi par les ministres à Zurich.

Capodistrias appelé à Vienne La calèche de Lenzbourg

Comme pour les rapports antérieurs, nous ignorons quelle fut la réaction officielle à ces lettres des 9 et 10 septembre. Nous la connaissons tout de même indirectement par la lettre que Capodistrias, encore sous le coup de la surprise, envoie le 24 septembre à la Diète pour annoncer son départ (Document n° 82): «Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies vient d’or-

1. ibidem, f. 19, no 19, lettre de Capodistrias à Alexandre, 29 août/10 septembre, transmettant une supplique de Louis Fauche-Borel.

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donner au soussigné de s’absenter de son poste et de se rendre auprès de son Auguste Personne à Vienne.» Son vœu est donc réalisé, sans que nous sachions si c’est uniquement pour y présenter les affaires suisses ou dans une optique plus générale.

Cette réponse, Capodistrias devait pourtant l’espérer, puisqu’il avait écrit le 18 septembre déjà à J. Herzog von Effingen à Aarau, pour renoncer à la commande d’une voiture à la fabrique de Lenzbourg: [...] «Toute reflexion faite, je renonce pour le moment au plaisir d’une dormeuse, et je continuerai de me servir de ma calèche qu’on est a réparer et qui pourra aller encore longtems» (Document n° 78).

Travaux de la Diète

Pour en revenir à la Suisse, les ministres sont officiellement informés de l’adoption du Pacte par une note du 10 septembre:1

En adressant la présente communication à Vos Excellences, la Diète sent vivement ce qu’elle doit aux soins officieux et bienveillants qui ont influé d’une manière essentielle sur les résultats de ses dernières délibérations. (La note de Vos Excellences, en date du 13 Août, mérite en particulier toute sa reconnaissance. Digne de l’attention la plus sérieuse, elle a paru au moment où la Diète s’occupait à chercher des voies de conciliation, et, après avoir aidé à les trouver, elle a fortement engagé les cantons à les suivre.)

Ce même jour, on lit à la Diète les actes concernant les réclamations territoriales et les dédommagements réclamés officiellement par Berne, Uri, Schwytz, Nidwald, Zoug, Glaris et Appenzell-Bhodes intérieures: la Diète décide de ne pas intervenir dans ces questions pour le moment.2 Le 12 septembre, les membres de la députation officielle au Congrès de Vienne sont nommés: le Zurichois Reinhard, le Fribourgeois Montenach et le Bâlois Wieland. Dans la même séance, la Diète arrête ensuite que «Neuchâtel, Valais et Genève seroient agrégés comme Cantons et partie intégrante à la Confédération Suisse».3 Les ministres sont informés de ces décisions par deux notes séparées le 13 septembre.4

1. Abschied 1814-1815, t. II, p. 13-14.

2. AEG, Conf. B.l, p. 14, séance du 10 septembre 1814.

3. ibidem, p. 15, séance du 12 septembre 1814.

4. Abschied 1814-1815, t. II, p. 15. Notes du 13 septembre 1814.

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Ce n’est que le 16 septembre que les ministres d’Autriche, d’Angleterre et de Russie (de Chambrier est toujours à Neuchâtel) répondront à la note du 13. Seule une copie de leur réponse figure aux Archives fédérales; nous la transcrivons donc ici:1

Copie

à S.E. Monsieur le Président de la Diète extraordinaire.

C’est avec une veritable satisfaction que les Ministres soussignés ont appris par la note de la Diète du 10e de ce mois, que le dernier projet de pacte fédéral a eu l’assentiment de la grande majorité des Cantons — Majorité accrue depuis par l’accession de quelques autres. Elle sera, il faut l’espérer, bientôt convertie en unanimité, l’erreur qui tient à l’écart encore quelques uns de ceux, qui par leur ancienneté dans la confédération y ont toujours tenu une place honorable, ne pouvant pas être longue, — et l’obstacle mis momentanément à l’énonciation du vœu du Canton de Tessin venant de cesser.

Leurs très augustes Souverains verront ainsi avec plaisir arriver près d’eux la légation que la Diète vient de décréter. Elle peut être sûre de trouver toujours en eux cette même bienveillance, qui n’a jamais cessé d’affectionner les vrais, grands et durables intérêts de ce pays-ci.

Les soussignés pourront ils voir aujourd’hui finir cet échange continuel d’inculpations, de menaces sourdes, d’armemens ouverts, dont quelques cantons molestèrent le passage d’un pacte à l’autre? Préparer une défense (c’est le nom que chacun a voulu donner à ces armemens) lorsque personne n’ose attaquer impunément, lorsque tous sont également protégés par ces grands principes fédéraux, conservateurs du repos et de l’ordre public, maintenus provisoirement et nécessairement dans toute leur vigueur,— en présence même des Ministres des puissances alliées, gardiens de la paix, — c’était assurément perdre de vue autant de considérations qui auraient dû leur déconseiller tous ces mouvemens, et qu’aujourd’hui au moins, puisqu’un nouveau lien les y oblige — sortiront enfin leur plein effet.

Les soussignés prient S.E. Monsieur le Président et la Diète extraordinaire d’agréer les assurances de leur haute considération.

Zurich, le 16 7bre 1813.

signé:

Schraut

Stratford Canning

Le Comte Capodistrias

Pour copie conforme Pour le chancelier de la Confédération le Secrétaire d’Etat du Canton de Zurich

(signé)

Lavater

3. ARCHIVES FÉDÉRALES, Berne, 1983. Correspondance des Ministres des Puissances alliées avec le Landamman, Période 1814-1818, f. 123, copie de la note de Schraut, Stratford Canning et Capodistrias au Président de la Diète, Zurich, 16 septembre 1814. Publiée dans Abschied 1814-1815, t. II, p. 15-16.

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Le ton n’est pas celui d’un Te Deum, et les mêmes inquiétudes exprimées par Capodistrias à Nesselrode restent sous-jacentes, malgré le soulagement que doit procurer aux ministres la conclusion de l’affaire.

Et c’est aussi parce que le Pacte a été conclu et que les questions en litige doivent être tranchées sous peu, qu’éclate une série de troubles dans les régions qui ne sont pas satisfaites du sort qu’on leur réserve. Ce qui entraîne une nouvelle intervention de Capodistrias, alors que son mandat semblait terminé, dans les affaires saint-galloise, tessinoise et fribourgeoise.

Nouveaux troubles à St-Gall

Le statut de Rapperswil

Au début du mois d’août, les autorités saint-galloises, dépassées par l’agitation qui avait éclaté dans les districts d’Uznach et de Sargans, s’étaient adressées à la Diète pour obtenir l’aide d’une intervention armée fédérale; mais le calme étant revenu, l’intervention n’avait pas eu lieu.1 L’adoption de la constitution cantonale par le Grand Conseil le 31 août ranime les brandons de la discorde.

Capodistrias est appelé à intervenir à propos de la situation réservée à la ville de Rapperwil. Il a reçu un long mémoire à ce sujet de Johann-Baptist Curti, qui n’a pas accepté avec ses compatriotes l’inégalité de traitement entre les villes de Saint-Gall et Rapperswil et garde l’espoir que cette dernière pourra se séparer du canton de Saint-Gall et jouir du statut de ville libre. La réponse de Capodistrias est très ferme: il exhorte Curti à renoncer à tout espoir là-dessus. Par contre, il envoie ce même jour, 18 septembre, une copie de cette réponse et une lettre personnelle à Müller-Friedberg (Document n° 79 et annexe), par laquelle il encourage vivement son ami à faire avec les autorités saintgalloises quelques concessions aux notables de Rapperswil pour obtenir leur collaboration dans le nouvel ordre des choses.

Le peuple de Saint-Gall, profondément déçu par le recul des droits démocratiques dans la nouvelle constitution, se révolte après son adoption. Müller-Friedberg et deux autres membres du gouvernement, rendus responsables, sont obligés de se réfugier dans le canton voisin de Thurgovie. Le gouvernement saint-gallois demande à nouveau le secours de la Diète et celle-ci délègue dès le 24 septembre sur place le conseiller zurichois Escher de la Linth et le landamman appenzellois Zellweger.

1. v. supra, p. 233 et Documents nos 69 et 70.

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C’est probablement cette décision qu’approuvent les ministres d’Angleterre et de Russie dans leur note au président de la Diète, Escher, qui vient de remplacer Reinhard parti pour Vienne (Document n° 83); il s’agit vraisemblablement de la dernière des notes signées par Capodistrias avant son départ. Les ministres approuvent vigoureusement l’appui apporté par la Diète au gouvernement officiel de Saint-Gall, mai sii sestiment qu’il est nécessaire de «déclarer d’une manière claire et publique que le sort définitif des districts reclamés, dont il est question dans la Convention, ne sera nullement préjugé par la mise en activité de la Constitution».

L’intervention efficace et pondérée des députés de la Diète rétablira le calme, sauf à Sargans et Uznach, où la résistance était fortement encouragée par Schwytz et où la Diète dut envoyer un contingent militaire à la mi-octobre, qui rétablit l’ordre. Cette intervention coûta cher aux insurgés, qui furent condamnés à en payer les frais. Dès le début de l’année 1815, la constitution put être appliquée et le gouvernement dirigé à nouveau par Müller-Friedberg. Capodistrias l’en félicitera d’ailleurs dans une lettre écrite dans un moment critique de l’histoire, de Vienne, le 28 mars 1815:1 «J’ai appris avec une satisfaction particulière, par la lettre que vous me fites l’honneur de m’adresser, que vos concitoyens ont rendu justice à votre patriotisme et au mérité qui vous distinguent en vous plaçant à la tête de leur gouvernement.» Il y resta jusqu’en 1831 !

Schaffhouse

Certains cantons ont réussi à régler tranquillement leurs problèmes et ont traversé cette période de crise sans qu’il y ait intervention extérieure. Ils sont donc restés en dehors de cette étude. C’est le cas de Zurich, Bâle et Schaffhouse. On perçoit le soulagement qu’a dû procurer cet état de fait à Capodistrias dans la seule copie de lettre du ministre russe qui figure dans les Archives de Schaffhouse. Au fond, il demande à Nesselrode de récompenser cette bonne volonté par un geste tangible.2

1. STAATSARCHIV, Saint-Gall, R.1 No 39a. Lettre de Capodistrias au Landamman de Saint-Gall Müller-Friedberg, Vienne, 16/28 mars 1815.

2. STAATSARCHIV, Schaffhouse, no 441. Copie d’une lettre de Capodistrias à Nesselrode, de Zurich, 23 septembre 1814, accompagnant une lettre de Balthasar Pfister, député à la Diète, au Conseil de la Ville, datée de Zurich, 25 septembre 1814.

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Monsieur le Comte!

Le passage des trouppes russes dans le canton de Schafhouse a occasioné à ce Canton une dépense d’environ 1000 Louis. Celui des autrichiens bien d’avantage. Ce Canton ayant chargé la Deputation Suisse de veiller à des interets territoriaux dont il croit devoir s’occuper dans ces circonstances, il se fait du passage des trouppes alliées sur son territoire et des fraix qu’il a supportés, un titre pour solliciter la bienveillance des augustes souverains alliés, à l’égard de ces réclamations.

Ce qu’il demande est très peu de chose. Ce sont des territoires allemands peu considérables enclavés dans le sien, mais dont la position gene la communication intérieure du canton de Schafhouse.

La députation suisse qui aura l’honneur de présenter ma depeche à Votre Excellence est à même de lui soumettre les détail et les motifs de ces prétentions. Je me borne ici à la récommander à V.E. comme me paraissant très moderée et justifiée par des convenances réelles. Si des considérations plus particulières au canton de Schafhouse devaient influer sur une décision en sa faveur, j’ajouterois qu’independemment des services qu’il a rendus aux armées alliées, il mérité la bienveillance de Notre Auguste Maitre par la sagesse de son gouvernement dont l’esprit et les principes correspondent parfaitement aux vuës salutaires sur les quelles Sa Majesté Impériale a voulu fonder la restauration de la Suisse.

J’ai l’honneur d’etre avec une haute consideration Monsieur le Comte! de V. E.

le Comte Capodistria

Zuric le 11/23 7bre 1814

Nouveaux troubles au Tessin

La situation au Tessin entre par contre à nouveau dans une phase critique. D’une part, le mouvement séparatiste en Léventine resurgit et provoque l’ire du ministre russe. On se souvient que Capodistrias et ses collègues s’étaient opposés très fermement le 1er mai1 à la possibilité d’une séparation de cette région convoitée par Uri, du canton du Tessin, séparation qui serait décidée par les habitants, les ministres estimant que cette question devrait être tranchée par une décision supérieure.

Capodistrias apprenant que la Diète va s’occuper de la création d’un gouvernement provisoire pour cette région, s’insurge violemment contre ce fait dans une lettre qu’il adresse le 21 septembre à Paul Usteri (Document n° 80). Capodistrias semble ignorer qui a remplacé Bein-

1. v. supra, p. 107 et Document n° 47.

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hard, parti à Vienne, dans sa charge de président de la Diète et il prie son ami de transmettre à qui de droit sa protestation. Il souligne que cette mesure lui semble «injuste, absurde, ignoble, dangereuse». Ce qui le révolte, c’est que la Diète ne consulte pas le canton du Tessin à ce sujet (il y a une certaine contradiction sur ce point avec sa lettre du 1er mai), au moment même où elle délègue des commissaires pour aider le gouvernement à rétablir l’ordre et appliquer la constitution. «Vous profitez du malheur qui frappe votre frère pour le tuer.» Il estime en outre que c’est un encouragement et un fort mauvais exemple pour d’autres régions dissidentes, en particulier pour les Saint-Gallois des districts mécontents. «Vous dites à tous ceux qui ont des prétentions territoriales, faites insurger le pays que vous voulez arracher, renversez son Gouvern(emen)t et votre procès est gagné.»

D’autre part, le gouvernement tessinois doit faire face en ce moment à une révolte populaire, dite révolution de Giubiasco, qui éclate au cœur même du canton dans les districts de Lugano et de Bellinzone et est dirigée par des chefs compétents qui obtiennent dès la fin du mois d’août la démission du gouvernement et l’installation d’une «Régence provisoire», en mesure de présenter dès le 4 septembre un nouveau projet de constitution. Car la cause primordiale de cette révolte est l’adoption le 29 juillet par le Grand Conseil de la constitution cantonale jugée trop peu démocratique et trop marquée par le sceau de l’étranger. Les «observations» de Capodistrias y avaient joué — on s’en souvient — un rôle important et c’est par là qu’il est mêlé à la seconde phase de l’affaire tessinoise, même s’il n’a guère le temps d’intervenir dans le déroulement des événements avant son départ pour Vienne.

L’envoi par la Diète d’un premier commissaire fédéral lucernois, le 31 août, et de quelques troupes, n’a pas suffi pour rétablir l’ordre, et des nouvelles inquiétantes sur la situation tessinoise parviennent à Zurich. C’est la raison pour laquelle Capodistrias et Canning adressent au landamman une note (Document n° 81) le 23 septembre, juste avant le départ du ministre russe, où ils rappellent la part active qu’ils ont prise dans la «réforme» de l’acte constitutionnel et où ils déplorent d’être laissés dans l’ignorance de la situation réelle du canton et des mesures envisagées par la Diète pour y maintenir l’ordre et rétablir la constitution. C’est précisément dans sa séance du même jour que la Diète décidera l’envoi de deux nouveaux commissaires en la personne du Zurichois Hirzel et du Grison Albertini. Seul, le premier jouera un rôle important dans la suite de l’affaire, mais laissera par la dureté de ses mesures un souvenir amer au Tessin. La Diète charge également le

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landamman Zellweger et le conseiller d’Etat Finsler de se rendre auprès des ministres pour leur communiquer les dernières nouvelles reçues du Tessin, ainsi que les dispositions prises dans le but d’y rétablir l’ordre.1

L’entretien a probablement eu lieu avant le départ de Capodistrias le 25, mais les «ministres» ne sont jamais cités nommément; il nous semble cependant que Krüdener, chargé de remplacer Capodistrias pendant son absence, n’aurait pu être désigné sous ce titre. Finsler rendra compte de leur mission au cours de la séance de la Diète du 28 septembre, dans un rapport que l’on décidera de classer comme «confidentiel».2 Dans l’entretien, les ministres ont émis l’avis que les troubles au Tessin ont pour cause principale des questions de personnes plus que la constitution elle-même, constitution qui du reste n’a pas leur approbation inconditionnelle. La part qu’ils ont prise à sa rédaction a consisté à améliorer un projet défectueux, qui portait tous les germes de l’anarchie, et à l’harmoniser avec d’autres constitutions. Si cette constitution ne satisfait pas les Tessinois et est en opposition avec leurs coutumes et leurs besoins, ils ne chercheront pas à l’imposer à tout prix, mais ils attendront alors des commissaires fédéraux et de la Diète des propositions pour un meilleur ordre des choses. Ce qu’ils ne veulent pas, c’est donner la victoire aux factieux en reconnaissant leur «régence provisoire» et leur projet de constitution; mais ils sont prêts à accepter un gouvernement provisoire issu des autorités légales et une délibération sur un nouveau projet de constitution, le tout supervisé en quelque sorte par les commissaires fédéraux.

Dès le 30 septembre, la Diète a pris la décision de soutenir les autorités légales. Le commissaire Hirzel dispose sur place de troupes importantes: quatre compagnies de Lucernois et une compagnie de Bernois. L’ordre est rétabli dans les semaines suivantes, le gouvernement légal remis en selle, un nouveau projet de constitution approuvé par la Diète et adopté par le Grand Conseil tessinois en décembre 1814. Ce projet est dû en grande partie à la plume de Paul Usteri, dont l’intervention paraît judicieuse puisque son étiquette de libéral était une caution pour les Tessinois et son amitié avec Capodistrias un gage pour les ministres.

Mais la répression s’est abbatue lourdement sur le canton: les arrestations des insurgés se multiplient; un tribunal spécial est institué par la Diète, avec l’approbation du gouvernement tessinois, pour les

1. Abschied 1814-1815, t. II, p. 319.

2. ibidem, p. 322.

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juger, et la présidence en est confiée à Hirzel. Les condamnations très lourdes prononcées par ce tribunal, la répartition entre un certain nombre de familles tessinoises, qui en seront souvent ruinées, des frais énormes de justice et de l’intervention fédérale, la mort suspecte, dans la prison de Lugano, du chef politique de la rébellion, l’avocat Angelo Maria Stoppani, très estimé dans sa patrie, laisseront une profonde amertume dans le cœur des Tessinois.

Aussi n’est-on pas surpris de trouver sous la plume d’historiens tessinois actuels un jugement très défavorable sur l’immixtion des ministres étrangers dans leur politique intérieure: ils vont jusqu’à tirer de cette affaire la conclusion qu’à un moment où toute la Suisse s’était inclinée avec servilité devant la volonté des Puissances absolutistes, seul le Tessin a su protester énergiquement et a donné à la Confédération un exemple unique de maturité civique.1

Fribourg: affaire Praroman, Duc et Chappuis

L’ironie de l’histoire veut qu’un autre canton, l’un des plus aristocratiques de la Confédération, Fribourg, ait lui aussi, semblablement au démocratique Tessin, protesté contre l’ingérence des ministres des puissances étrangères dans ses affaires intérieures.

Les ministres avaient envoyé en date du 28 juin une semonce au gouvernement fribourgeois, l’engageant à soumettre, comme les autres cantons, sa constitution à leurs observations dans le but de l’harmoniser avec les autres constitutions.2

Ce n’est que le 29 août que le gouvernement fribourgeois veut bien répondre par une contre-note,3 affirmant pour expliquer son retard que ladite note ne lui était parvenue que le 31 juillet. En fait, les magistrats fribourgeois ont surtout attendu de voir comment le vent tournerait; les cantons aristocratiques prenant le dessus, ils décident de camper sur leurs positions:

Provoqué par quelques observations de leurs ministres sur sa nouvelle constitution, il [le Gouvernement de Fribourg] a cherché à les édifier par l’exposé et la justification des bases, sur les-

1. Giulio Rossi - Eligio Pometta, Storia del Cantone Ticino, Locamo 1980. Notre documentation repose sur les pages 215 à 221.

2. v. supra, p. 171 et Document no 57.

3. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Auswärtige Correspondenz 18141815, p. 28-29, contre-note de Γ Avoyer et du Conseil d’Etat de Fribourg à Schraut et Capodistrias, 29 août 1814.

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quelles elle repose; il a cherché à les convaincre, que ces bases, tout en se rattachant aux institutions respectables de ses pères, étaient adaptées aux circonstances et à l’esprit du tems; qu’elles étaient surtout calquées sur les besoins et le génie du canton, qui est différent de tout ce qui l’environne; que publiées dans le tems elles avaient obtenu l’assentiment général et n’avaient trouvé de détracteurs que dans quelques ambitieux.

Il se retranche une fois de plus derrière la déclaration des Alliés lors de leur entrée en Suisse, de ne pas s’immiscer dans la politique intérieure des Etats; et plus subtilement encore derrière le principe introduit dans le nouveau projet du Pacte qui prévoyait que les cantons ne se garantissaient plus leurs constitutions et que celles-ci ne devaient plus être soumises à l’approbation de la Diète.1

Maintenant qu’un principe différent est consacré par le nouveau pacte fédéral, soumis à la ratification des cantons, rien ne s’oppose plus à ce que la constitution du canton de Fribourg ne soit déposée à l’archive confédérale, et qu’elle n’obtienne en même tems la publicité requise.

Un des premiers soins du Gouvernement de Fribourg sera de déférer au vœu de leurs Excellences les Ministres plénipotentiaires, et de leur offrir un exemplaire de cet ouvrage qui n’étant que le développement des principes renfermés dans sa réponse du 7 juin leur est pour ainsi dire déjà connu.

La réponse frisait l’insolence; que les ministres aient mal pris la chose, nous en avons le témoignage dans une copie de lettre écrite par Henri Monod à l’un des Fribourgeois de l’opposition:2

Zurich, le 12. 7bre 1814.

Copie

Monsieur !

Je pense que vous aurez eu ma lettre d’avant-hier à laquelle je me refère. Dès lors j’ai appris que les Ministres ont fait demander à votre gouvernement Sa Constitution pour la voir, que celui-ci doit avoir répondu dans une lettre assez déplacée que Ses Députés l’avoient et la remettroient. Sur cela hier les Ministres ont écrit à Montenach par Mr le Comte de Capo-d’Istria pour la lui demander, il a repondu qu’il n’avoit point d’ordre de Son Gouvernement. Je ne sais pas encore ce que diront les Ministres là dessus, mais le fait est certain, et l’on m’a dit qu’ils n’en auroient

1. Van Muyden, op. cit., p. 135.

2. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach.

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pas le démenti; l’on m’a ajouté qu’ils marchoient tous d’accord sur ce point, et entendoient procurer des changements, qu’ils étoient clans l’attente de l’envoy du mémoire en question, et l’on m’a même chargé de vous dire de leur envoyer un double à chacun d’eux. Ce que je vous marque est donc une Commission qui me vient de bon lieu, vous devez savoir d’où [...].

Tout porte à penser que le «on» est Capodistrias lui-même; en tout cas, les ministres eux non plus n’ont pas changé d’avis et ils vont insister pour obtenir gain de cause. Cette lettre nous fait entrer de plain-pied dans la sombre affaire Duc, Praroman et Chappuis qui empoisonnera les rapports des deux parties dans les mois suivants. C’est à Monod, une fois de plus, que nous emprunterons son récit clair et circonstancié de la genèse de l’affaire:1

[...] Pendant le peu de temps que je fus chez moi lorsque je vins avec mes collègues apporter le nouveau pacte fédéral à Lausanne, j’eus la visite de trois Fribourgeois, MM. de Praroman, beau-père du précédent avoyer de Diesbach, Chappuis, avocat, et Duc. Le plus grand nombre des communes de leur canton, me dirent-ils, avait fait des représentations pour réclamer contre le système qui paraissait devoir s’établir; en réponse, on les avait exécutées militairement et on avait sévi contre leurs chefs; indignés, ils m’assuraient que ce sentiment était partagé par la masse des habitants et me demandaient mon avis. Je leur répondis que d’autres cantons dans leur cas s’étaient adressés aux ministres des Puissances alliées qui étaient principalement chargés de concilier les différents partis, ce qui avait réussi pour plusieurs.

Comme je retournais à Zurich, ils me prièrent de parler de leur position à ces ministres et de leur demander la permission de leur adresser un mémoire. Ils désiraient seulement de n’être pas obligés de le signer pour éviter de nouvelles violences, promettant au surplus que ce mémoire ne contiendrait rien que des faits faciles à vérifier. Je fis ma commission à Capo d’Istria, et Capo d’Istria n’hésita pas à me répondre qu’il le recevrait volontiers. Bien plus, en ayant parlé à ses collègues, tous firent la même réponse.

Une vingtaine de ces opposants à la constitution fribourgeoise, recrutés soit dans l’ancienne noblesse, soit dans les milieux patriotes, se sont rencontrés le 27 août et ont pris l’engagement de «s’aider réciproquement de leurs lumières, de leurs conseils et de leurs biens pour

1. Monod, op. cit., t. II, p. 285-286.

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atteindre le Bésultat désiré».1 Ils ont fait imprimer à Lausanne un mémoire sur leurs griefs intitulé «Exposé de la situation politique du peuple fribourgeois»,2 dans lequel ils regrettent, entre autres, que seuls Fribourg et Berne n’aient pas répondu à l’attente des ministres et refusent d’appliquer les principes libéraux.

Cependant l’espoir d’un changement a toujours jusqu’ici entretenu la patience et nourri la modération. Cet espoir s’est fortifié encore, lorsque l’on fut informé que le Gouvernement de Soleur était obligé de renoncer à son système d’exclusion et de reconnaître par une nouvelle constitution, l’égalité des droits politiques, et que cette heureuse mutation dans l’état du peuple Soleurois était l’effet d’une coopération efficace de la part des Ministres des Hautes Puissances; la même perspective sembloit venir à la rencontre des désirs des Fribourgeois.

Reprenons le récit de Monod:3

Sur cette assurance, les mêmes personnes qui étaient venues chez moi se rendirent à Zurich, y présentèrent elles-mêmes leur mémoire, et y furent accueillies. Elles s’en retournaient pleines d’espérance, lorsqu’elles apprirent à Aarau qu’on devait les arrêter à leur retour dans leur canton. Inquiètes, elles rétrogradent et obtiennent des lettres pour leur gouvernement de Capo d’Istria et de Canning. Ces ministres observaient qu’en s’adressant à eux pour présenter des remarques sur la constitution projetée, on n’avait fait qu’user d’un droit que donnait la proclamation même de Fribourg du 14 janvier précédent; que d’ailleurs les ministres des Alliés étaient singulièrement chargés de travailler à arranger les affaires de la Suisse et que, pour y parvenir, ils devaient entendre tous les partis. Ils écrivirent de plus à Schraut, qui était à Berne et qui envoya aussitôt un sauf-conduit à ces trois Fribourgeois. Munis de ces pièces, ces derniers partent avec assurance et sont arrêtés à la porte même de Berne, où était l’envoyé à la signature duquel ils s’étaient fiés.

L’entrevue entre Capodistrias et les Fribourgeois Blanc, Praroman et l’avocat Chappuis est racontée par ce dernier au cours de sa défense lors du procès:4

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman, Duc et Consorts, no 8. L’original du document avec les signatures figure dans les pièces à conviction.

2. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman..., no 46, imprimé en français, p. 2.

3. Monod, op. cit., p. 286-287.

4. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman..., Défense de Chappuis, ff. 1.4 et 2.1.

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Vint le voyage de Zurich, voyage sans préparatif, sans appareil, executé dans le silence, comme dans des intentions de Paix. Le Ministre de Russie en avoit été prévenu, et c’est sur son invitation que l’on se mit en route. A Zurich nous eûmes la délicatesse de lui demander, avant d’entrer en matière, si la Constitution de Fribourg avoit l’assentiment des Ministres des Hautes Puissances, et si, à défaut de cette sanction, on pouvoit espérer quelques changemens estimés utiles, ou même nécessaires. Il nous répondit qu’il recevroit volontiers des explications, et que même il les attendoit.

Nous lui présentâmes en conséquence l’exposé, que j’avois rédigé d’après nos vues communes; nous l’avions fait imprimer, parce que des personnes de poids nous l’avoient conseillé, et parce que nous pensions qu’un imprimé seroit lu avec plus d’attention qu’un manuscrit, mais, tout en consentant à l’impression, j’avois formellement réservé, qu’il n’en seroit point distribué dans le public, et recommandé même toutes les précautions nécessaires, pour l’éviter.

Mr Capo d’Istria nous remit à une nouvelle audience, dans l’intervalle il nous envoya deux exemplaires de la Constitution de Fribourg, en nous invitant à lui remettre à ce sujet des observations par écrit, nous les rédigeâmes en commun, et les lui présentâmes.

Dans une troisième audience il nous dit: le Mémoire est bien, les observations sont biens, mais je vous invite encore à me donner par écrit les moyens d’opérer les rectifications nécessaires. C’est lui même qui, dans cette occasion, nous conseilla de demander 1° qu’il n’y ait point de différence de Bourgeoisie à Fribourg. 2° qu’il soit accordé à la campagne une représentation de la moitié, ouau moins du tiers, en nous observant que c’étoit ce qu’il avoit lui même demandé lors de son passage à Fribourg.

Lorsque nous primes congé, il nous remit une lettre pour Son Excellence Werro, après nous l’avoir lue, en nous chargeant de la remettre à la Poste. Cette lettre renferme l’apologie de notre conduite. Il nous en remit aussi une pour Son Excellence Mr le Baron de Schraut en nous recommandant de la lui apporter nous mêmes, et de conferer avec lui sur son contenu. Mr Strafford Canning Ministre de Sa Majesté Britannique, nous en remit aussi une à la même adresse et pour le même but.

La lettre à de Werro est datée du 24 septembre et les Fribourgeois ont probablement pris congé ce jour-là de Capodistrias, soit deux jours avant son départ à Vienne. Nous en connaissons le contenu grâce à une copie envoyée par de Krüdener au baron Griset de Forell en date du 11 décembre 1814, pour servir à la défense de Praroman.1 La voici:

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman..., 1814.

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Copie Son Excellence Mr le Comte de Capod’istria à Mr l’avoyer Werro. 24 7bre 1814.

Monsieur l’Avoyer!

Vos compatriotes Mrs de Praromann, Blanc ancien Conseiller d’Etat, et Chapuis, sont venus à Zurich pour communiquer à moi, ainsi qu’à mes collègues les observations qu’ils croyent devoir faire à la nouvelle constitution, de votre Canton qui vient de paroitre.

Comme cette demarche pourroit être envisagée, par quelques Intolerents, sous un faux Jour, et d’une manière peu favorable, à ceux qui s’en sont chargés, je crois dans mon particulier devoir donner à V.E. quelques éclaircissements, qui tranquilliseront, j’espère toutes les consciences.

Tout Citoyen de Fribourg à le droit de se demander d’après vôtre proclamation du 14e Janvier, si la nouvelle constitution est conforme aux vues libérales, annoncées par les Ministres alliés, dans les communications, qu’ils vous ont faites, relativement à la réorganisation de votre République, et s’il ne peut pas se répondre d’une manière satisfaisante, il a nécessairement le droit d’aller à la source et d’y chercher les notions les plus positives, pour connoitre d’une manière incontestable la decision de Son Sort.

Votre Gouvernement, ne peut donc pas réprouver une Demarche aussi conséquente, et aussi légitime. Je puis vous dire plus, Mr l’Avoyer, il doit même savoir gré à des Citoyens, qui ayant surtout à cœur l’honneur et la Gloire de leur patrie, plutôt que des Interrets personnels, commencent par obéir, avec la plus grande résignation, aux Autorités constituées de leur Pays, et se permettent seulement de faire des ouvertures aux Ministres, dont le but ne peut dans aucun cas, qu’être salutaires au repos et au bonnheur du Canton.

Vous aurez en tems et lieux la conviction la plus satisfaisante, de ce que j’ai l’honneur de vous dire, en attendant ayant tout lieu de croire que V.E. partage mon opinion, au sujet de Ses Compatriotes qui se sont rendus à Zurich, je me dispense de les recommander à Ses bontés.

Je pars dans deux jours pour Vienne ou S.M. l’Empereur a daigné m’appeller auprès de Sa personne auguste.

Je désire cependant que V.E. fasse parvenir à Mr le Baron de Krudner qui reste ici, un mot qui annonce la réception de la présente.

Je pris S.E. etc.

Seulement, entre-temps, on avait arrêté à Berne un étudiant du nom de Frossard qui transportait des lettres compromettantes de Duc à Monod et à des amis à Vienne. Une lettre figurant dans les archives Diesbach, datée de Vienne, le 19 octobre 1814,1 d’un auteur non iden-

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach.

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tifié mais partisan des libéraux (peut-être Joseph Vernazza), précise même: «Frossard a été arrêté à Berne, Ses papiers ont été examinés et saisis avec les dépêches dont il était chargé pour le ministre de Russie et le Conseiller Laharpe. C’est un affront qu’ils n’oublieront pas de sitôt ni l’un ni l’autre. En attendant c’est sans doute ce qui a trahi Duc.»

Duc est arrêté le 2 octobre, Blanc, Praroman et Chappuis sont appréhendés le 3 par la police bernoise, sur leur chemin de retour, malgré la lettre de Capodistrias à de Werro et le sauf-conduit de Schraut, et ils seront remis par la suite aux autorités fribourgeoises.

Dès leur arrestation, l’affaire prend la tournure d’un incident diplomatique. Le jour même, Schraut adresse une note indignée à l’avoyer de Watteville:1

Il espère encore que cette arrestation n’est que l’effet d’un malentendu, très extraordinaire assurément, mais qui pourrait toutefois être susceptible d’une explication adoucissante. S’il en était autrement, il a l’honneur de prévenir Monsieur l’Avoyer en charge et le Conseil secret, que les suites d’une telle mesure, si on ne la retire pas incessamment, ne pourront être que très fâcheuses, et pour le gouvernement de Fribourg qui semble l’avoir provoquée, et pour le gouvernement de Berne qui aurait cru devoir s’y prêter.

Le surlendemain, il se fait plus pressant encore:2

[...] si d’ici au 8 ils ne lui font pas représenter par le chef de la police les trois particuliers, désignés dans sa note précédente, il se verra forcé, bien malgré lui, de rompre toute communication avec le gouvernement de ce canton et de quitter immédiatement son territoire; il ne pourra pas continuer sa résidence dans un pays où l’on ose entraver ses communications, intercepter les personnes qui lui sont adressées par Messieurs les Ministres de Russie et d’Angleterre, ses collègues, dans l’importante négociation dont ils se trouvent chargés en commun, rejeter sans égard son passeport et son sauf-conduit les plus formels, le tout sous les prétextes les plus inadmissibles.

Et le 5 octobre, il envoie à l’ancien avoyer de Diesbach, gendre de Praroman, un message rassurant.3

Le 10 octobre, Canning décide de s’adresser directement à l’avoyer

1. Abschied 1814-1815, t. II, p. 21.

2. ibidem, t. II, p. 22.

3. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach, lettre de Schraut au baron de Diesbach, Berne, 5 octobre 1814.

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de Fribourg pour s’expliquer. Après avoir rappelé les faits, il enchaîne:1

Je ne pretends nullement, Monsieur, à un droit général de m’ériger en tribunal d’appel entre les Gouvernements et les Gouvernés; mais, vû la position provisoire et mal-assise de ce paysci, et mes instructions de concourir, de concert avec mes Collègues, à sa tranquillité permanente, je dois insister sur celui de me prêter à toutes les communications nécessaires pour cet objet, et exiger que nul individu ne soit lésé à cause de m’avoir fait part de ses sentimens. Les Hautes Puissances Alliées n’ont, et ne peuvent avoir, d’autre intention que celle de rendre à la Suisse le repos et l’indépendance. Pour parvenir efficacement à ce but, il faut examiner les différends, concilier les esprits, accorder les partis, et donner à tous un intérêt commun [...].

Si les individus sus-mentionnés ont été arrêtés seulement à cause de la démarche qu’ils ont faite vis-à-vis de moi et de mes Collègues, j’aime à me persuader qu’après cette explication, le Gouvernement de votre Canton, Monsieur, ne tardera pas un moment à leur rendre la liberté. Ce sera le seul moyen de faire effacer la mauvaise impression, qu’une rigueur aussi mal-placée est propre à produire. Mais si, d’un autre côté, l’arrestation de ces personnes ne doit pas être rapportée à la cause que je viens de nommer, mais bien à d’autres circonstances, qui intéressent la tranquillité de votre Canton; j’invite très instamment Votre Excellence à m’en donner une assurance positive, et y ajouter de telles explications que [sic] puissent m’éclaircir là-dessus d’une manière satisfaisante.

Le même jour, le gouvernement bernois se justifie dans une note circulaire aux ministres de Russie, France, Grande-Bretagne, Wurtemberg et Hollande; il leur communique les notes échangées avec Schraut, persiste à traiter les trois individus arrêtés de perturbateurs de l’ordre public et «regrette beaucoup que ce fâcheux événement le prive de la personne d’un Ministre qui avait soutenu avec lui depuis sept années les relations les plus amicales, dont il avait reçu bien des preuves de bienveillance et d’intérêt, et auquel il a voué une haute estime personnelle».2 Absence qui ne sera pas de très longue durée, puisque, comme le remarque caustiquement Monod,3 «après quelque temps d’attente, Schraut et les ministres qui l’avaient appuyé, ne recevant aucune réponse, oublièrent l’insulte qu’ils avaient reçue. Le ministre d’Autriche,

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Correspondance diplomatique 18141818. Lettre de Canning à l’Avoyer de Fribourg, Zurich, le 10 octobre 1814.

2. Abschied 1814-1815, t. II, p. 23.

3. Monod, op. cit., p. 287-288.

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entre autres, après s’être ennuyé quelque temps à Zurich, retourna auprès des vieilles connaissances bernoises avec lesquelles il tenait à faire tous les soirs sa partie pour se délasser de ses travaux diplomatiques».

Entre-temps, les ministres ont reçu un exemplaire de cette malheureuse constitution fribourgeoise et en accusent sèchement réception:1

Les Soussignés ont tardé à accuser au Gouvernement de Fribourg la réception du nouvel Acte de Constitution que leur ont remis les Députés de ce Canton. Cet ouvrage attendant encore son complément dans une partie essentielle, ils ont cru devoir différer les observations auquel il peut donner lieu.

Pendant tout le mois de novembre, le procès Praroman est instruit. Au début décembre, une série d’interventions en faveur des inculpés a lieu: le 11 décembre un vibrant plaidoyer de l’ancien avoyer de Diesbach au nom des parents de Praroman, auprès des ministres, pour qu’ils interviennent en sa faveur;2 le même jour, la lettre de Krüdener au baron Griset de Forell, à qui il transmet la copie de la lettre de Capodistrias à l’avoyer de Werro transcrite plus haut. Il informe Forell que «Mr de Schraut a été chargé de demander au Gouvernement de Fribourg que cette affaire ne soit pas poursuivie. Cette raison aurait pu rendre superflu l’envoi de la lettre de Mr le Cte de Capodistrias mais je me suis fait un vrai plaisir Monsieur le Baron de Vous offrir cette légère preuve de mon dévouement et de mon amitié».3 Le 15 décembre, Krüdener s’adresse à l’avoyer de Werro pour appuyer la demande que Schraut lui a faite le 6 décembre de surseoir au jugement des personnes arrêtées.

Le procès aura lieu dans les derniers jours de décembre. Chacun reste sur ses positions. Dans sa défense, l’avocat Chappuis précise:4

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Correspondance diplomatique 18141818. Note de Schraut et Stratford Canning à l’avoyer de Werro, 23 octobre 1814.

2. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach.

3. La lettre originale de Krüdener au baron de Forell est datée avec une erreur de Zurich, 11 septembre (au lieu du 11 décembre) et se trouve dans les Archives Diesbach, mais sans la copie annoncée de la lettre de Capodistrias à de Werro du 24 septembre. Par contre, dans le Dossier Procès Praroman figure la copie des deux lettres, avec la date du 11 décembre 1814. Nous sommes surprise d’y lire: «Mr de Schraut a été chargé par Mr le Prince de Metternich», ce qui donne évidemment un tout autre poids à la démarche. Nous nous demandons qui est le copiste qui a fait cette adjonction et souhaitons qu’il n’y ait pas de modification semblable dans la lettre de Capodistrias transcrite plus haut.

4. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman, Défense de M. Chappuis, ff. 4.4 et 5.1.

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Nous n’avons d’ailleurs pas même formé de demande expresse, nous nous sommes bornés à demander avis et conseil, et à offrir des explications, pour le cas, ou la Constitution de Fribourg n’auroit pas reçu l’assentiment des Ministres; nous pensions, que, sous leurs auspices et appuyés par eux, nos Représentations trouveraient plus facilement accès auprès de notre Gouvernement.

Enfin c’est une vérité notoire dans toute l’Helvetie, que le Pacte fédéral, et la constitution de chaque canton sont subordonnés à la sanction et à la garantie des Hautes Puissances. Est-il besoin d’une autre considération pour constater la competance de leurs Ministres accrédités auprès de la Confédération et justifier notre démarche ?

Pour les autorités fribourgeoises, s’adresser aux ministres des Puissances alliées est un acte de trahison. Et l’on retiendra comme chef d’accusation contre plusieurs inculpés non seulement l’«Exposé de la situation politiquedu peuple fribourgeois» déjà mentionné, mais aussi un premier mémoire envoyé à Capodistrias, dans le courant du mois de mai. Dans son rapport, le président de la Cour d’appel, l’avoyer Techtermann, s’y oppose et précise:1 «Ce manuscrit signé par Monsr l’avocat Chappuis rédacteur, et Mr de Praroman, d’Affry, et le Président Wicky n’a pu être produit au procès. Mr Chappuis déclare [...] qu’il ne contenoit que des observations sur la primitive constitution de la ville de Fribourg.» Nous connaissons actuellement ce mémoire grâce à la copie qui se trouve dans les papiers d’Henri Monod2 et pouvons constater que ces affirmations étaient rigoureusement exactes.

Le jugement avec les lourdes peines auxquelles sont condamnés les accusés est publié sans commentaire dans plusieurs journaux.3 Mais le fait que l’on retienne comme criminelles les relations qu’ils ont entretenues avec les ministres, et en particulier avec Capodistrias dont le nom est plusieurs fois cité dans les actes du jugement, suscite une vi goureuse réaction de la part de Krüdener, qui écrit le 7 janvier au président de la Diète, le bourgmestre de Wyss:4

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg. Dossier Procès Praroman, Copie du rapport de Techterman, président du tribunal d’appel et avoyer, fait dans la séance du Conseil d’appel le 29 décembre 1814, f. 1.

2. BCU, Fonds Monod Ko 17, publié dans Monod, op. cit., t. II, p. 424-427.

3. Par exemplé dans Der Schweizerfreund, 5 janvier 1815, n° 1, p. 4-5 ou la Gazette Gazette de Lausanne, no 1, mardi 3 janvier 1815.

4. Abschied 1814-1815, t. II, p. 27.

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Zurich, le 7 Janvier 1815.

Monsieur le Président,

Votre Excellence voudra bien permettre que je Lui exprime toute ma surprise de la manière dont je vois paraître le nom de Monsieur le Comte Capodistria dans les actes du procès criminel qui vient d’être jugé à Fribourg, et dont plusieurs journaux de la Suisse publient le résultat. Des citoyens de Fribourg sont déclarés criminels et subissent la flétrissure d’une condamnation, pour avoir eu des relations, qui n’étaient que trop autorisées par leur but et par les circonstances, avec le Ministre de Sa Majesté l’Empereur de Russie. C’est ainsi que le gouvernement de ce canton se permet d’insulter à la fois, et la mission politique et le caractère personnel de celui à qui l’Empereur a daigné confier l’exécution de ses vues aussi bienveillantes qu’éclairées à l’égard des peuples suisses. Je sais, Monsieur le Président, que la Diète n’a pas de pouvoir sur les actes des cantons lorsqu’ils sont indépendans des obligations fédérales. Mais dans tous les temps les constitutions de la Suisse ont prévu les cas où la conduite de l’un des Etats venant à compromettre les intérêts et les principes de la Confédération, il appartient à la Diète de l’en avertir et de le désavouer. La Diète a trop bien su exprimer en toute occasion les justes sentimens que lui inspire la sollicitude active des monarques alliés en faveur de la Suisse, pour rester indifférente à tout ce qui blesse les égards dus à leurs Ministres.

J’ose espérer, Monsieur le Président, que Votre Excellence reconnaît la justesse de mes observations, et que les résolutions de la Diète sur le fait dont je viens d’avoir l’honneur de l’entretenir, feront hautement paraître combien il est étranger à ses sentimens.

J’ai l’honneur d’être avec la plus haute considération, Monsieur le Président, de Votre Excellence, le très humble et très obéissant serviteur,

Le Baron de Krüdener.

Ce n’est que le 18 janvier que le Président de la Diète communique cette note aux députés. Celui de Fribourg s’étonne de la démarche qu’il estime inadéquate; mais la majorité des députés décide de confier à la commission diplomatique le soin d’examiner l’affaire. Un rapport est présenté le 1er février qui cherche à ménager les susceptibilités. Plutôt que de suivre la démarche logique qui consisterait à demander des explications au gouvernement de Fribourg et à les faire parvenir au secrétaire de légation, la commission préfère tenter les moyens de conciliation et dans une note à Krüderner, elle réitère l’expression de sa reconnaissance à l’égard de Capodistrias:1

1. Abschied, 1814-1815, t. II, p. 29. Note du bourgmestre du canton de Zurich, Président de la Diète, au baron de Krüdener, Zurich, 1cr février 1814.

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    Il paraît conséquemment que les transactions dont on va s’occuper à Vienne devront d’abord tendre à faire manquer toutes ces alliances en préparant celles qui seront les plus conformes au système politique que la Russie veut embrasser.

    Ce système ne semble guère pouvoir être fondé dans un moment où les plus grands états du continent vacillent sur leurs bases, et où l’Angleterre est dans le plus haut degré de sa puissance. Ce n’est que le temps qui pourra donner la mesure de la stabilité de la Constitution française et des succès des différentes branches des Bourbons. Ce n’est que le temps et l’incertitude de l’avenir qui peuvent faire manquer les projets de l’Autriche sur l’Italie et sur le midi de l’Allemagne. Ce n’est que le temps et l’incertitude de l’avenir qui peuvent tenir en respect des gouvernements illibéraux envers leurs peuples, qui peuvent conserver le bon esprit des nations souhaitant un meilleur sort, qui peuvent rendre efficace et salutaire l’influence de l’Empereur Alexandre. Ainsi reculer à un terme éloigné la stipulation des transactions finales entre les Souverains réunis à Vienne paraîtra être la mesure la plus utile aux intérêts de la Russie.

    On sent en avance que ces vœux peuvent être incompatibles avec les circonstances et contraires aux conventions et arrangements antérieurs.

    S’il était possible de les réaliser en partie ce serait encore un avantage. L’Allemagne doit avoir une constitution. Peut-être le sort de la Pologne doit-il être décidé.

    Pourquoi ne mettrait-on pas sur la même ligne les intérêts généraux de la navigation et du commerce et pour celui de la Russie en particulier le libre passage par la mer Noire dans l’Adriatique et dans la Méditerranée. Les affaires de l’Orient seraient entamées par cette dernière ouverture et l’Angleterre et l’Autriche forcées de dévoiler leur politique à l’égard de la Porte. Les négociations relatives à tant d’objets importants ne pourraient certainement être achevées ni à Vienne ni en peu de temps ni sous l’inspection immédiate des souveranis.

    Ainsi en séparant les questions, en décidant pour le moment celles qu’on peut considérer comme fondamentales, on pourrait remettre toutes les autres à un congrès général qui s’ouvrirait dans une petite ville d’Allemagne et qui dans l’espace de quelques années, pacifierait l’Europe. C’est de cette manière qu’on gagnerait tout le temps que pourrait exiger la composition d’un grand système politique pour la Russie, et cet intervalle servirait utilement à rassembler les notions indispensables pour baser solidement ce vaste édifice [...].

    Pour réaliser ces desseins, Capodistrias suggère à l’empereur d’utiliser les membres des Légations russes à l’étranger.