Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τ. Δ΄

Τίτλος:Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τ. Δ΄
 
Τόπος έκδοσης:Κέρκυρα
 
Εκδότης:Εταιρεία Κερκυραϊκών Σπουδών
 
Συντελεστές:Κώστας Δαφνής
 
Έτος έκδοσης:1984
 
Σελίδες:364
 
Θέμα:Ο Καποδίστριας στην Ελβετία
 
Τοπική κάλυψη:Ελβετία
 
Χρονική κάλυψη:1813-1814
 
Περίληψη:O τέταρτος τόμος του ΑΡΧΕΙΟΥ ΚΑΠΟΔΙΣΤΡΙΑ καλύπτει, την αποστολή του Καποδίστρια στην Ελβετία το 1813-1814, που είχε για στόχο την απόσπασή της από τη γαλλική κηδεμονία και την ενότητα και ειρήνευση της χώρας, που θα εξασφάλιζε ένα Σύνταγμα κοινής αποδοχής. Ο Καποδίστριας πέτυχε στην αποστολή του αυτή και η επιτυχία απέσπασε την εκτίμηση και την εμπιστοσύνη του Αυτοκράτορα της Ρωσίας και άνοιξε το δρόμο για τη μετέπειτα λαμπρή σταδιοδρομία του.
 
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L’affaire est discutée par le Petit Conseil vaudois dans sa séance du 15 août; au cours des jours suivants, il est décidé d’accepter la proposition, pour autant que l’Argovie y soit aussi partie prenante. On se met d’accord sur le nombre des délégués (deux par canton), sur le lieu (Morat), sur la date (le 2 septembre), les Vaudois insistant pour que les pourparlers aient lieu avant la reprise des travaux de la Diète.1

Les résultats des entretiens seront très décevants. Si les députés bernois, Graf et Zeerleder, se montrent parfaitement courtois, les instructions qu’ils tiennent de leur gouvernement ignorent les Argoviens et ne comportent qu’une série de revendications financières très abusives à l’égard du canton de Vaud. Conférence qui apparemment se solde par un échec, mais qui a tout de même eu le mérite de mettre en présence les parties adverses.

La Harpe à Zurich

A peine arrivé à Lausanne, Monod est rappelé par Reinhard à Zurich pour participer dès le 1er septembre aux travaux de la commission diplomatique qui doit préparer les instructions à remettre aux députés à Vienne. Cela lui permet de rencontrer La Harpe, chargé de défendre au Congrès les intérêts des Vaudois et des Tessinois, qui fait halte pour quelques jours à Zurich. Sa présence dans les coulisses de la Diète contrarie fort quelques ministres. Dans son rapport à Metternich du 15 septembre,2 Schraut déplore sa présence et celle de Rengger, anciens ministres de la République helvétique, au moment où la Diète doit se prononcer sur le Pacte fédéral. La Harpe suit de près ce qui se fait à la Diète «et toujours dans la plus étroite accointance avec les Vaudois et les Argoviens dont l’animosité contre Berne approche du délire». Et plus loin: «Il tourna en tout sens pour m’engager d’entrer avec lui dans la discussion de la contreverse entre ces trois Cantons, me disant que dans sa qualité de Vaudois, il ne pouvait faire moins, que de tâcher de rendre service à son pays; il voulut que je le chargeasse de quelque Commission pour Vienne, de quelque lettre pour Votre Altesse, ajoutant que Mr Rengger, auquel il était attaché d’ancienne amitié, ferait avec lui ce voyage. Je l’ai comblé de politesses jusqu’à son départ, sans entrer avec lui sur aucune

1. L’ensemble des documents vaudois sur cette conférence sont publiés dans Monod, op. cit., t. II, p. 406-424. Les documents argoviens sont groupés auxar chives d’Etat d’Aarau, dans AA2 Mappe P, no 18.

2. ARCHIVES D’ÉTAT DE VIENNE, Schweiz. Berichte, fasc. 248, n° 112 (= AEG ms hist. 46, f. 360), rapport de Schraut à Metternich du 15 septembre 1814.

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affaire, ni de ce pays-ci, ni d’un autre. Mr de Capo d’Istria lui-même n’était pas trop à son aise de la présence de ce personnage dans ce moment; et quant au Ministre d’Angleterre, il ne prit pas même la peine de lui déguiser le sentiment dont Elle l’affectait.»

C’est pourtant La Harpe que Capodistrias choisit comme intermédiaire pour avertir Monod de ne pas s’entêter à outrance. Monod rapporte1 dans ses Mémoires:

Comme en ratifiant le Pacte fédéral tous les cantons, le nôtre entre autres, n’avaient pas ratifié la convention qui y était jointe, les grandes difficultés qu’on avait voulu concilier par là subsistaient toujours. On crut, dans le but de les terminer, devoir rassembler en particulier les députations en désaccord, avant d’assembler la Diète même. Dans les cantons qui n’avaient pas accepté, il y en avait qui avaient eu autant ou plus d’intérêt que nous à en agir ainsi, mais nous étions celui qui montrait le plus de vigueur et de fermeté, et l’on ne doutait pas, si on parvenait à nous faire céder, que les autres n’en fissent autant. On crut donc devoir chercher à nous intimider, et le ministre anglais s’en chargea. Il déclara que si on ne pouvait pas s’entendre, il était d’avis que les XIII anciens Cantons se confédérassent, et qu’on les reconnût. Capo d’Istria, loin de réclamer en rappelant les engagements des trois puissances, chargea de La Harpe, qui n’était pas encore parti, de me faire part de cette menace, qui, si elle n’était pas sérieuse, avait été suivie de la part du même Cannnig d’une autre peut-être plus dangereuse. Il ne s’agissait de rien moins que de partager la Suisse, si dans la quinzaine on n’était pas d’accord. Capo d’Istria laissait entrevoir que ceci pourrait bien être une prédiction de ce qui arriverait.

C’est donc La Harpe qui a dû remettre le petit billet entièrement autographe griffonné à ce sujet par le ministre russe (Document n° 75), daté du 3 septembre et classé dans la correspondance de Capodistrias à Monod. Nous ignorons si l’entretien entre Zellweger, Canning et Capodistrias eut lieu à Baden ou à Zurich. Et nous pensons que La Harpe aura plutôt encouragé Monod à tenir bon qu’à céder.

Adoption du Pacte fédéral

La Diète reprend ses travaux et le 9 septembre, la plupart des cantons, y compris Berne, ratifient le Pacte avec ou sans réserve. De fortes objections sont formulées contre la convention par les nouveaux cantons, mais elle n’est finalement refusée que par Vaud.

1. Monod, op. cit., p. 276-277.

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On accepte ensuite à la majorité des voix la Déclaration d’acceptation du Pacte fédéral présenté par la Chancellerie comme le résultat de la discussion du jour précédent et la Commission Diplomatique est chargée de rédiger un projet de serment pour jurer le dit Pacte. Les Etats absens de Nidwalden, Schwitz et Tessin sont informés par voie de courriers de ces délibérations et invités à y accéder. Notification faite aux Ministres des Puissances Alliées de cette constitution, la même notification devra avoir lieu à l’égard des monarques alliés au prochain Congrès de Vienne par le moyen d’une Députation.1

Schwytz et Nidwald resteront sourds à l’appel et vont même quelques jours plus tard rétablir entre eux par serment le Pacte qui avait uni les trois Waldstätten en 1315 ! Ce n’est que plusieurs mois plus tard qu’ils rentreront dans le giron de la Confédération. Et il faut attendre la fin des troubles au Tessin pour que ce canton puisse accepter officiellement le Pacte dans les derniers jours de novembre 1814.

Cette version du Pacte était moins contraignante que le projet du mois de mai, que certains cantons comme Bâle aurait préféré. Elle faisait des concessions importantes aux conservateurs et aux fédéralistes à outrance. Les cantons ne se garantissaient plus réciproquement leurs constitutions qui n’avaient plus à recevoir l’approbation de la Diète. Elle n’accordait pas de garantie fédérale aux territoires en litige jusqu’à ce que la solution soit trouvée; elle laissait une souveraineté presque absolue aux cantons; les attributions du pouvoir central étaient encore diminuées. Le Vorort alternerait tous les deux ans entre Zurich, Berne et Lucerne.2

Les partisans d’un Etat plus centralisé préfèrent accepter cette situation boiteuse plutôt que de permettre aux grandes Puissances d’intervenir dans leurs affaires intérieures. De plus, l’adoption du Pacte permettait à la Confédération de se faire représenter officiellement au Congrès de Vienne, où seraient tranchées la plupart des questions pendantes.

Rapports de Capodistrias à Nesselrode et au tsar

Le soir même de l’adoption du Pacte, Capodistrias envoie un rapport à Nesselrode et deux messages personnels à l’empereur. Dans son rapport à Nesselrode,3 Capodistrias annonce l’acceptation du Pacte

1. AEG, Conf. B.l, p. 14, séance du 9 septembre 1814.

2. Van Muyden, op. cit., p. 135.

3. AEG, Ms hist. 45, f. 25v, no 58, copie de la lettre de Capodistrias à Nesselrode, datée de Zurich, le 28 août/9 septembre 1814.

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par la Diète, qu’une députation ira porter à Vienne pour le soumettre:

Malheureusement cet acte résultant de la conciliation d’une partie des intérêts opposés n’a pu les comprendre tous et plusieurs prétentions importantes ont été mises en réserve par les Etats qui n’ont ni voulu les sacrifier au bien général ni pu les faire admettre par leurs adversaires. Des efforts continuels de ma part et de celle des Ministres alliés pour amener les Suisses à s’accorder d’eux mêmes sur leurs contestations de territoire n’ont abouti qu’à prouver que leurs passions portées à l’extrême les en rendent incapables et que c’est à l’impartialité des P.A. à trancher ces questions par une décision péremptoire. Cet objet [...] demande nécessairement un accord préalable avec les autres cabinets Alliés car les différends qui se sont élevés entre les Cantons sur la fixation de leurs territoires n’ont point été envisagés sous le même point de vue par tous les Ministres résidant à Zürich. Il est donc indispensable que cette légère divergence dont la source remonte jusqu’aux cabinets soit écartée par eux mêmes. Un travail que je prépare pour S.M.I. et sur lequel j’attends ses ordres, pour aller le Lui soumettre à Vienne ou pour le Lui adresser d’ici, contiendra le développement des questions que cet objet embrasse et de la manière la plus juste et la plus conforme à tous les intérêts de les décider.

La teneur de la lettre qu’il adresse à ce sujet à l’empereur1 est identique et se termine également par le souhait d’être appelé à Vienne.

Non sans hésitation, semble-t-il, et encouragé par La Harpe, il envoie ce même jour à l’empereur une longue digression2 sur la voie que devrait emprunter, selon son idée, la politique extérieure russe. Il insiste beaucoup sur le rôle prépondérant que peut jouer le tsar dans cette époque cruciale.

[...] Ainsi en considérant dans l’ordre de l’opinion et de l’influence morale la puissance des Princes qui gouvernent l’Europe, nul d’entre eux ne peut contester une prépondérance absolue à la Puissance de l’Empereur Alexandre. Employer cette Puissance à l’extérieur avec mesure et d’après un système ce serait favoriser la régénération de la Russie, préparer celle de l’Orient et servir l’humanité.

De ce système. Tous les cabinets connaissent et redoutent l’étendue et la force de cette Puissance morale qui est entre les mains de l’Empereur Alexandre. C’est le principe qui provoquera peut être les alliances les plus extraordinaires et les plus secrètes.

1. ibidem, f. 17v, no 17, lettre de Capodistrias à Alexandre, datée de Zurich, 28 août/9 septembre 1814.

2. ibidem, f. 17v, no 18, lettre de Capodistrias à Alexandre, datée de Zurich, 28 août/9 septembre 1814.

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Il paraît conséquemment que les transactions dont on va s’occuper à Vienne devront d’abord tendre à faire manquer toutes ces alliances en préparant celles qui seront les plus conformes au système politique que la Russie veut embrasser.

Ce système ne semble guère pouvoir être fondé dans un moment où les plus grands états du continent vacillent sur leurs bases, et où l’Angleterre est dans le plus haut degré de sa puissance. Ce n’est que le temps qui pourra donner la mesure de la stabilité de la Constitution française et des succès des différentes branches des Bourbons. Ce n’est que le temps et l’incertitude de l’avenir qui peuvent faire manquer les projets de l’Autriche sur l’Italie et sur le midi de l’Allemagne. Ce n’est que le temps et l’incertitude de l’avenir qui peuvent tenir en respect des gouvernements illibéraux envers leurs peuples, qui peuvent conserver le bon esprit des nations souhaitant un meilleur sort, qui peuvent rendre efficace et salutaire l’influence de l’Empereur Alexandre. Ainsi reculer à un terme éloigné la stipulation des transactions finales entre les Souverains réunis à Vienne paraîtra être la mesure la plus utile aux intérêts de la Russie.

On sent en avance que ces vœux peuvent être incompatibles avec les circonstances et contraires aux conventions et arrangements antérieurs.

S’il était possible de les réaliser en partie ce serait encore un avantage. L’Allemagne doit avoir une constitution. Peut-être le sort de la Pologne doit-il être décidé.

Pourquoi ne mettrait-on pas sur la même ligne les intérêts généraux de la navigation et du commerce et pour celui de la Russie en particulier le libre passage par la mer Noire dans l’Adriatique et dans la Méditerranée. Les affaires de l’Orient seraient entamées par cette dernière ouverture et l’Angleterre et l’Autriche forcées de dévoiler leur politique à l’égard de la Porte. Les négociations relatives à tant d’objets importants ne pourraient certainement être achevées ni à Vienne ni en peu de temps ni sous l’inspection immédiate des souveranis.

Ainsi en séparant les questions, en décidant pour le moment celles qu’on peut considérer comme fondamentales, on pourrait remettre toutes les autres à un congrès général qui s’ouvrirait dans une petite ville d’Allemagne et qui dans l’espace de quelques années, pacifierait l’Europe. C’est de cette manière qu’on gagnerait tout le temps que pourrait exiger la composition d’un grand système politique pour la Russie, et cet intervalle servirait utilement à rassembler les notions indispensables pour baser solidement ce vaste édifice [...].

Pour réaliser ces desseins, Capodistrias suggère à l’empereur d’utiliser les membres des Légations russes à l’étranger.

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Louis Fauche-Borel

Il faut ajouter à ces rapports une troisième lettre à l’empereur, datée du 29 août/10 septembre1 et accompagnant une supplique du Neuchâtelois Fauche-Borel. Ce libraire, père de famille tranquille, fidèle sujet du roi de Prusse, s’était trouvé jeté au cours de la Révolution dans le parti monarchiste français et était devenu l’un des agents les plus actifs et téméraires de Louis XVIII, servant d’intermédiaire auprès des généraux Pichegru et Moreau, puis du directeur Barras, que les royalistes avaient eu l’espoir de faire basculer successivement dans leur camp. L’échec du mouvement royaliste du 4 septembre 1797 et surtout le coup d’Etat du 18 Brumaire 1799 qui porta Bonaparte au pouvoir et entraîna la chute de Barras, déjouèrent ces plans. En 1814, Fauche-Borel est toujours en possession des lettres patentes signées par Louis XVIII à Mittau en 1799 pour Barras, lettres dont il envoie copie à l’empereur Alexandre. Le libraire neuchâtelois a passé plusieurs années à la prison du Temple, il s’est entièrement ruiné pour la cause du roi et il attendra —en vain, il faut bien le dire— dès la Restauration, la récompense de ses services. Il publiera quatre volumes de Mémoires pour expliquer ses déboires et finira par se suicider en 1829.

Ce qu’il voudrait d’Alexandre en septembre 1814, c’est une marque de satisfaction. Par les dédales tortueux des collections d’autographes, la lettre que Capodistrias écrit à Fauche-Borel (Document n° 76) pour l’avertir qu’il a transmis sa demande à l’empereur, se trouve aux Archives du Collège Calvin de Genève! On peut se demander si Capodistrias aurait été aussi aimable dans ses termes s’il avait su que Fauche-Borel s’était chargé peu de temps auparavant de transmettre au prince-régent de Grande-Bretagne un mémoire des Bernois, plaidant leur cause en s’opposant au plan établi par les ministres à Zurich.

Capodistrias appelé à Vienne La calèche de Lenzbourg

Comme pour les rapports antérieurs, nous ignorons quelle fut la réaction officielle à ces lettres des 9 et 10 septembre. Nous la connaissons tout de même indirectement par la lettre que Capodistrias, encore sous le coup de la surprise, envoie le 24 septembre à la Diète pour annoncer son départ (Document n° 82): «Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies vient d’or-

1. ibidem, f. 19, no 19, lettre de Capodistrias à Alexandre, 29 août/10 septembre, transmettant une supplique de Louis Fauche-Borel.

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donner au soussigné de s’absenter de son poste et de se rendre auprès de son Auguste Personne à Vienne.» Son vœu est donc réalisé, sans que nous sachions si c’est uniquement pour y présenter les affaires suisses ou dans une optique plus générale.

Cette réponse, Capodistrias devait pourtant l’espérer, puisqu’il avait écrit le 18 septembre déjà à J. Herzog von Effingen à Aarau, pour renoncer à la commande d’une voiture à la fabrique de Lenzbourg: [...] «Toute reflexion faite, je renonce pour le moment au plaisir d’une dormeuse, et je continuerai de me servir de ma calèche qu’on est a réparer et qui pourra aller encore longtems» (Document n° 78).

Travaux de la Diète

Pour en revenir à la Suisse, les ministres sont officiellement informés de l’adoption du Pacte par une note du 10 septembre:1

En adressant la présente communication à Vos Excellences, la Diète sent vivement ce qu’elle doit aux soins officieux et bienveillants qui ont influé d’une manière essentielle sur les résultats de ses dernières délibérations. (La note de Vos Excellences, en date du 13 Août, mérite en particulier toute sa reconnaissance. Digne de l’attention la plus sérieuse, elle a paru au moment où la Diète s’occupait à chercher des voies de conciliation, et, après avoir aidé à les trouver, elle a fortement engagé les cantons à les suivre.)

Ce même jour, on lit à la Diète les actes concernant les réclamations territoriales et les dédommagements réclamés officiellement par Berne, Uri, Schwytz, Nidwald, Zoug, Glaris et Appenzell-Bhodes intérieures: la Diète décide de ne pas intervenir dans ces questions pour le moment.2 Le 12 septembre, les membres de la députation officielle au Congrès de Vienne sont nommés: le Zurichois Reinhard, le Fribourgeois Montenach et le Bâlois Wieland. Dans la même séance, la Diète arrête ensuite que «Neuchâtel, Valais et Genève seroient agrégés comme Cantons et partie intégrante à la Confédération Suisse».3 Les ministres sont informés de ces décisions par deux notes séparées le 13 septembre.4

1. Abschied 1814-1815, t. II, p. 13-14.

2. AEG, Conf. B.l, p. 14, séance du 10 septembre 1814.

3. ibidem, p. 15, séance du 12 septembre 1814.

4. Abschied 1814-1815, t. II, p. 15. Notes du 13 septembre 1814.

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Ce n’est que le 16 septembre que les ministres d’Autriche, d’Angleterre et de Russie (de Chambrier est toujours à Neuchâtel) répondront à la note du 13. Seule une copie de leur réponse figure aux Archives fédérales; nous la transcrivons donc ici:1

Copie

à S.E. Monsieur le Président de la Diète extraordinaire.

C’est avec une veritable satisfaction que les Ministres soussignés ont appris par la note de la Diète du 10e de ce mois, que le dernier projet de pacte fédéral a eu l’assentiment de la grande majorité des Cantons — Majorité accrue depuis par l’accession de quelques autres. Elle sera, il faut l’espérer, bientôt convertie en unanimité, l’erreur qui tient à l’écart encore quelques uns de ceux, qui par leur ancienneté dans la confédération y ont toujours tenu une place honorable, ne pouvant pas être longue, — et l’obstacle mis momentanément à l’énonciation du vœu du Canton de Tessin venant de cesser.

Leurs très augustes Souverains verront ainsi avec plaisir arriver près d’eux la légation que la Diète vient de décréter. Elle peut être sûre de trouver toujours en eux cette même bienveillance, qui n’a jamais cessé d’affectionner les vrais, grands et durables intérêts de ce pays-ci.

Les soussignés pourront ils voir aujourd’hui finir cet échange continuel d’inculpations, de menaces sourdes, d’armemens ouverts, dont quelques cantons molestèrent le passage d’un pacte à l’autre? Préparer une défense (c’est le nom que chacun a voulu donner à ces armemens) lorsque personne n’ose attaquer impunément, lorsque tous sont également protégés par ces grands principes fédéraux, conservateurs du repos et de l’ordre public, maintenus provisoirement et nécessairement dans toute leur vigueur,— en présence même des Ministres des puissances alliées, gardiens de la paix, — c’était assurément perdre de vue autant de considérations qui auraient dû leur déconseiller tous ces mouvemens, et qu’aujourd’hui au moins, puisqu’un nouveau lien les y oblige — sortiront enfin leur plein effet.

Les soussignés prient S.E. Monsieur le Président et la Diète extraordinaire d’agréer les assurances de leur haute considération.

Zurich, le 16 7bre 1813.

signé:

Schraut

Stratford Canning

Le Comte Capodistrias

Pour copie conforme Pour le chancelier de la Confédération le Secrétaire d’Etat du Canton de Zurich

(signé)

Lavater

3. ARCHIVES FÉDÉRALES, Berne, 1983. Correspondance des Ministres des Puissances alliées avec le Landamman, Période 1814-1818, f. 123, copie de la note de Schraut, Stratford Canning et Capodistrias au Président de la Diète, Zurich, 16 septembre 1814. Publiée dans Abschied 1814-1815, t. II, p. 15-16.

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Le ton n’est pas celui d’un Te Deum, et les mêmes inquiétudes exprimées par Capodistrias à Nesselrode restent sous-jacentes, malgré le soulagement que doit procurer aux ministres la conclusion de l’affaire.

Et c’est aussi parce que le Pacte a été conclu et que les questions en litige doivent être tranchées sous peu, qu’éclate une série de troubles dans les régions qui ne sont pas satisfaites du sort qu’on leur réserve. Ce qui entraîne une nouvelle intervention de Capodistrias, alors que son mandat semblait terminé, dans les affaires saint-galloise, tessinoise et fribourgeoise.

Nouveaux troubles à St-Gall

Le statut de Rapperswil

Au début du mois d’août, les autorités saint-galloises, dépassées par l’agitation qui avait éclaté dans les districts d’Uznach et de Sargans, s’étaient adressées à la Diète pour obtenir l’aide d’une intervention armée fédérale; mais le calme étant revenu, l’intervention n’avait pas eu lieu.1 L’adoption de la constitution cantonale par le Grand Conseil le 31 août ranime les brandons de la discorde.

Capodistrias est appelé à intervenir à propos de la situation réservée à la ville de Rapperwil. Il a reçu un long mémoire à ce sujet de Johann-Baptist Curti, qui n’a pas accepté avec ses compatriotes l’inégalité de traitement entre les villes de Saint-Gall et Rapperswil et garde l’espoir que cette dernière pourra se séparer du canton de Saint-Gall et jouir du statut de ville libre. La réponse de Capodistrias est très ferme: il exhorte Curti à renoncer à tout espoir là-dessus. Par contre, il envoie ce même jour, 18 septembre, une copie de cette réponse et une lettre personnelle à Müller-Friedberg (Document n° 79 et annexe), par laquelle il encourage vivement son ami à faire avec les autorités saintgalloises quelques concessions aux notables de Rapperswil pour obtenir leur collaboration dans le nouvel ordre des choses.

Le peuple de Saint-Gall, profondément déçu par le recul des droits démocratiques dans la nouvelle constitution, se révolte après son adoption. Müller-Friedberg et deux autres membres du gouvernement, rendus responsables, sont obligés de se réfugier dans le canton voisin de Thurgovie. Le gouvernement saint-gallois demande à nouveau le secours de la Diète et celle-ci délègue dès le 24 septembre sur place le conseiller zurichois Escher de la Linth et le landamman appenzellois Zellweger.

1. v. supra, p. 233 et Documents nos 69 et 70.

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C’est probablement cette décision qu’approuvent les ministres d’Angleterre et de Russie dans leur note au président de la Diète, Escher, qui vient de remplacer Reinhard parti pour Vienne (Document n° 83); il s’agit vraisemblablement de la dernière des notes signées par Capodistrias avant son départ. Les ministres approuvent vigoureusement l’appui apporté par la Diète au gouvernement officiel de Saint-Gall, mai sii sestiment qu’il est nécessaire de «déclarer d’une manière claire et publique que le sort définitif des districts reclamés, dont il est question dans la Convention, ne sera nullement préjugé par la mise en activité de la Constitution».

L’intervention efficace et pondérée des députés de la Diète rétablira le calme, sauf à Sargans et Uznach, où la résistance était fortement encouragée par Schwytz et où la Diète dut envoyer un contingent militaire à la mi-octobre, qui rétablit l’ordre. Cette intervention coûta cher aux insurgés, qui furent condamnés à en payer les frais. Dès le début de l’année 1815, la constitution put être appliquée et le gouvernement dirigé à nouveau par Müller-Friedberg. Capodistrias l’en félicitera d’ailleurs dans une lettre écrite dans un moment critique de l’histoire, de Vienne, le 28 mars 1815:1 «J’ai appris avec une satisfaction particulière, par la lettre que vous me fites l’honneur de m’adresser, que vos concitoyens ont rendu justice à votre patriotisme et au mérité qui vous distinguent en vous plaçant à la tête de leur gouvernement.» Il y resta jusqu’en 1831 !

Schaffhouse

Certains cantons ont réussi à régler tranquillement leurs problèmes et ont traversé cette période de crise sans qu’il y ait intervention extérieure. Ils sont donc restés en dehors de cette étude. C’est le cas de Zurich, Bâle et Schaffhouse. On perçoit le soulagement qu’a dû procurer cet état de fait à Capodistrias dans la seule copie de lettre du ministre russe qui figure dans les Archives de Schaffhouse. Au fond, il demande à Nesselrode de récompenser cette bonne volonté par un geste tangible.2

1. STAATSARCHIV, Saint-Gall, R.1 No 39a. Lettre de Capodistrias au Landamman de Saint-Gall Müller-Friedberg, Vienne, 16/28 mars 1815.

2. STAATSARCHIV, Schaffhouse, no 441. Copie d’une lettre de Capodistrias à Nesselrode, de Zurich, 23 septembre 1814, accompagnant une lettre de Balthasar Pfister, député à la Diète, au Conseil de la Ville, datée de Zurich, 25 septembre 1814.

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Monsieur le Comte!

Le passage des trouppes russes dans le canton de Schafhouse a occasioné à ce Canton une dépense d’environ 1000 Louis. Celui des autrichiens bien d’avantage. Ce Canton ayant chargé la Deputation Suisse de veiller à des interets territoriaux dont il croit devoir s’occuper dans ces circonstances, il se fait du passage des trouppes alliées sur son territoire et des fraix qu’il a supportés, un titre pour solliciter la bienveillance des augustes souverains alliés, à l’égard de ces réclamations.

Ce qu’il demande est très peu de chose. Ce sont des territoires allemands peu considérables enclavés dans le sien, mais dont la position gene la communication intérieure du canton de Schafhouse.

La députation suisse qui aura l’honneur de présenter ma depeche à Votre Excellence est à même de lui soumettre les détail et les motifs de ces prétentions. Je me borne ici à la récommander à V.E. comme me paraissant très moderée et justifiée par des convenances réelles. Si des considérations plus particulières au canton de Schafhouse devaient influer sur une décision en sa faveur, j’ajouterois qu’independemment des services qu’il a rendus aux armées alliées, il mérité la bienveillance de Notre Auguste Maitre par la sagesse de son gouvernement dont l’esprit et les principes correspondent parfaitement aux vuës salutaires sur les quelles Sa Majesté Impériale a voulu fonder la restauration de la Suisse.

J’ai l’honneur d’etre avec une haute consideration Monsieur le Comte! de V. E.

le Comte Capodistria

Zuric le 11/23 7bre 1814

Nouveaux troubles au Tessin

La situation au Tessin entre par contre à nouveau dans une phase critique. D’une part, le mouvement séparatiste en Léventine resurgit et provoque l’ire du ministre russe. On se souvient que Capodistrias et ses collègues s’étaient opposés très fermement le 1er mai1 à la possibilité d’une séparation de cette région convoitée par Uri, du canton du Tessin, séparation qui serait décidée par les habitants, les ministres estimant que cette question devrait être tranchée par une décision supérieure.

Capodistrias apprenant que la Diète va s’occuper de la création d’un gouvernement provisoire pour cette région, s’insurge violemment contre ce fait dans une lettre qu’il adresse le 21 septembre à Paul Usteri (Document n° 80). Capodistrias semble ignorer qui a remplacé Bein-

1. v. supra, p. 107 et Document n° 47.

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hard, parti à Vienne, dans sa charge de président de la Diète et il prie son ami de transmettre à qui de droit sa protestation. Il souligne que cette mesure lui semble «injuste, absurde, ignoble, dangereuse». Ce qui le révolte, c’est que la Diète ne consulte pas le canton du Tessin à ce sujet (il y a une certaine contradiction sur ce point avec sa lettre du 1er mai), au moment même où elle délègue des commissaires pour aider le gouvernement à rétablir l’ordre et appliquer la constitution. «Vous profitez du malheur qui frappe votre frère pour le tuer.» Il estime en outre que c’est un encouragement et un fort mauvais exemple pour d’autres régions dissidentes, en particulier pour les Saint-Gallois des districts mécontents. «Vous dites à tous ceux qui ont des prétentions territoriales, faites insurger le pays que vous voulez arracher, renversez son Gouvern(emen)t et votre procès est gagné.»

D’autre part, le gouvernement tessinois doit faire face en ce moment à une révolte populaire, dite révolution de Giubiasco, qui éclate au cœur même du canton dans les districts de Lugano et de Bellinzone et est dirigée par des chefs compétents qui obtiennent dès la fin du mois d’août la démission du gouvernement et l’installation d’une «Régence provisoire», en mesure de présenter dès le 4 septembre un nouveau projet de constitution. Car la cause primordiale de cette révolte est l’adoption le 29 juillet par le Grand Conseil de la constitution cantonale jugée trop peu démocratique et trop marquée par le sceau de l’étranger. Les «observations» de Capodistrias y avaient joué — on s’en souvient — un rôle important et c’est par là qu’il est mêlé à la seconde phase de l’affaire tessinoise, même s’il n’a guère le temps d’intervenir dans le déroulement des événements avant son départ pour Vienne.

L’envoi par la Diète d’un premier commissaire fédéral lucernois, le 31 août, et de quelques troupes, n’a pas suffi pour rétablir l’ordre, et des nouvelles inquiétantes sur la situation tessinoise parviennent à Zurich. C’est la raison pour laquelle Capodistrias et Canning adressent au landamman une note (Document n° 81) le 23 septembre, juste avant le départ du ministre russe, où ils rappellent la part active qu’ils ont prise dans la «réforme» de l’acte constitutionnel et où ils déplorent d’être laissés dans l’ignorance de la situation réelle du canton et des mesures envisagées par la Diète pour y maintenir l’ordre et rétablir la constitution. C’est précisément dans sa séance du même jour que la Diète décidera l’envoi de deux nouveaux commissaires en la personne du Zurichois Hirzel et du Grison Albertini. Seul, le premier jouera un rôle important dans la suite de l’affaire, mais laissera par la dureté de ses mesures un souvenir amer au Tessin. La Diète charge également le

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landamman Zellweger et le conseiller d’Etat Finsler de se rendre auprès des ministres pour leur communiquer les dernières nouvelles reçues du Tessin, ainsi que les dispositions prises dans le but d’y rétablir l’ordre.1

L’entretien a probablement eu lieu avant le départ de Capodistrias le 25, mais les «ministres» ne sont jamais cités nommément; il nous semble cependant que Krüdener, chargé de remplacer Capodistrias pendant son absence, n’aurait pu être désigné sous ce titre. Finsler rendra compte de leur mission au cours de la séance de la Diète du 28 septembre, dans un rapport que l’on décidera de classer comme «confidentiel».2 Dans l’entretien, les ministres ont émis l’avis que les troubles au Tessin ont pour cause principale des questions de personnes plus que la constitution elle-même, constitution qui du reste n’a pas leur approbation inconditionnelle. La part qu’ils ont prise à sa rédaction a consisté à améliorer un projet défectueux, qui portait tous les germes de l’anarchie, et à l’harmoniser avec d’autres constitutions. Si cette constitution ne satisfait pas les Tessinois et est en opposition avec leurs coutumes et leurs besoins, ils ne chercheront pas à l’imposer à tout prix, mais ils attendront alors des commissaires fédéraux et de la Diète des propositions pour un meilleur ordre des choses. Ce qu’ils ne veulent pas, c’est donner la victoire aux factieux en reconnaissant leur «régence provisoire» et leur projet de constitution; mais ils sont prêts à accepter un gouvernement provisoire issu des autorités légales et une délibération sur un nouveau projet de constitution, le tout supervisé en quelque sorte par les commissaires fédéraux.

Dès le 30 septembre, la Diète a pris la décision de soutenir les autorités légales. Le commissaire Hirzel dispose sur place de troupes importantes: quatre compagnies de Lucernois et une compagnie de Bernois. L’ordre est rétabli dans les semaines suivantes, le gouvernement légal remis en selle, un nouveau projet de constitution approuvé par la Diète et adopté par le Grand Conseil tessinois en décembre 1814. Ce projet est dû en grande partie à la plume de Paul Usteri, dont l’intervention paraît judicieuse puisque son étiquette de libéral était une caution pour les Tessinois et son amitié avec Capodistrias un gage pour les ministres.

Mais la répression s’est abbatue lourdement sur le canton: les arrestations des insurgés se multiplient; un tribunal spécial est institué par la Diète, avec l’approbation du gouvernement tessinois, pour les

1. Abschied 1814-1815, t. II, p. 319.

2. ibidem, p. 322.

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juger, et la présidence en est confiée à Hirzel. Les condamnations très lourdes prononcées par ce tribunal, la répartition entre un certain nombre de familles tessinoises, qui en seront souvent ruinées, des frais énormes de justice et de l’intervention fédérale, la mort suspecte, dans la prison de Lugano, du chef politique de la rébellion, l’avocat Angelo Maria Stoppani, très estimé dans sa patrie, laisseront une profonde amertume dans le cœur des Tessinois.

Aussi n’est-on pas surpris de trouver sous la plume d’historiens tessinois actuels un jugement très défavorable sur l’immixtion des ministres étrangers dans leur politique intérieure: ils vont jusqu’à tirer de cette affaire la conclusion qu’à un moment où toute la Suisse s’était inclinée avec servilité devant la volonté des Puissances absolutistes, seul le Tessin a su protester énergiquement et a donné à la Confédération un exemple unique de maturité civique.1

Fribourg: affaire Praroman, Duc et Chappuis

L’ironie de l’histoire veut qu’un autre canton, l’un des plus aristocratiques de la Confédération, Fribourg, ait lui aussi, semblablement au démocratique Tessin, protesté contre l’ingérence des ministres des puissances étrangères dans ses affaires intérieures.

Les ministres avaient envoyé en date du 28 juin une semonce au gouvernement fribourgeois, l’engageant à soumettre, comme les autres cantons, sa constitution à leurs observations dans le but de l’harmoniser avec les autres constitutions.2

Ce n’est que le 29 août que le gouvernement fribourgeois veut bien répondre par une contre-note,3 affirmant pour expliquer son retard que ladite note ne lui était parvenue que le 31 juillet. En fait, les magistrats fribourgeois ont surtout attendu de voir comment le vent tournerait; les cantons aristocratiques prenant le dessus, ils décident de camper sur leurs positions:

Provoqué par quelques observations de leurs ministres sur sa nouvelle constitution, il [le Gouvernement de Fribourg] a cherché à les édifier par l’exposé et la justification des bases, sur les-

1. Giulio Rossi - Eligio Pometta, Storia del Cantone Ticino, Locamo 1980. Notre documentation repose sur les pages 215 à 221.

2. v. supra, p. 171 et Document no 57.

3. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Auswärtige Correspondenz 18141815, p. 28-29, contre-note de Γ Avoyer et du Conseil d’Etat de Fribourg à Schraut et Capodistrias, 29 août 1814.

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quelles elle repose; il a cherché à les convaincre, que ces bases, tout en se rattachant aux institutions respectables de ses pères, étaient adaptées aux circonstances et à l’esprit du tems; qu’elles étaient surtout calquées sur les besoins et le génie du canton, qui est différent de tout ce qui l’environne; que publiées dans le tems elles avaient obtenu l’assentiment général et n’avaient trouvé de détracteurs que dans quelques ambitieux.

Il se retranche une fois de plus derrière la déclaration des Alliés lors de leur entrée en Suisse, de ne pas s’immiscer dans la politique intérieure des Etats; et plus subtilement encore derrière le principe introduit dans le nouveau projet du Pacte qui prévoyait que les cantons ne se garantissaient plus leurs constitutions et que celles-ci ne devaient plus être soumises à l’approbation de la Diète.1

Maintenant qu’un principe différent est consacré par le nouveau pacte fédéral, soumis à la ratification des cantons, rien ne s’oppose plus à ce que la constitution du canton de Fribourg ne soit déposée à l’archive confédérale, et qu’elle n’obtienne en même tems la publicité requise.

Un des premiers soins du Gouvernement de Fribourg sera de déférer au vœu de leurs Excellences les Ministres plénipotentiaires, et de leur offrir un exemplaire de cet ouvrage qui n’étant que le développement des principes renfermés dans sa réponse du 7 juin leur est pour ainsi dire déjà connu.

La réponse frisait l’insolence; que les ministres aient mal pris la chose, nous en avons le témoignage dans une copie de lettre écrite par Henri Monod à l’un des Fribourgeois de l’opposition:2

Zurich, le 12. 7bre 1814.

Copie

Monsieur !

Je pense que vous aurez eu ma lettre d’avant-hier à laquelle je me refère. Dès lors j’ai appris que les Ministres ont fait demander à votre gouvernement Sa Constitution pour la voir, que celui-ci doit avoir répondu dans une lettre assez déplacée que Ses Députés l’avoient et la remettroient. Sur cela hier les Ministres ont écrit à Montenach par Mr le Comte de Capo-d’Istria pour la lui demander, il a repondu qu’il n’avoit point d’ordre de Son Gouvernement. Je ne sais pas encore ce que diront les Ministres là dessus, mais le fait est certain, et l’on m’a dit qu’ils n’en auroient

1. Van Muyden, op. cit., p. 135.

2. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach.

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pas le démenti; l’on m’a ajouté qu’ils marchoient tous d’accord sur ce point, et entendoient procurer des changements, qu’ils étoient clans l’attente de l’envoy du mémoire en question, et l’on m’a même chargé de vous dire de leur envoyer un double à chacun d’eux. Ce que je vous marque est donc une Commission qui me vient de bon lieu, vous devez savoir d’où [...].

Tout porte à penser que le «on» est Capodistrias lui-même; en tout cas, les ministres eux non plus n’ont pas changé d’avis et ils vont insister pour obtenir gain de cause. Cette lettre nous fait entrer de plain-pied dans la sombre affaire Duc, Praroman et Chappuis qui empoisonnera les rapports des deux parties dans les mois suivants. C’est à Monod, une fois de plus, que nous emprunterons son récit clair et circonstancié de la genèse de l’affaire:1

[...] Pendant le peu de temps que je fus chez moi lorsque je vins avec mes collègues apporter le nouveau pacte fédéral à Lausanne, j’eus la visite de trois Fribourgeois, MM. de Praroman, beau-père du précédent avoyer de Diesbach, Chappuis, avocat, et Duc. Le plus grand nombre des communes de leur canton, me dirent-ils, avait fait des représentations pour réclamer contre le système qui paraissait devoir s’établir; en réponse, on les avait exécutées militairement et on avait sévi contre leurs chefs; indignés, ils m’assuraient que ce sentiment était partagé par la masse des habitants et me demandaient mon avis. Je leur répondis que d’autres cantons dans leur cas s’étaient adressés aux ministres des Puissances alliées qui étaient principalement chargés de concilier les différents partis, ce qui avait réussi pour plusieurs.

Comme je retournais à Zurich, ils me prièrent de parler de leur position à ces ministres et de leur demander la permission de leur adresser un mémoire. Ils désiraient seulement de n’être pas obligés de le signer pour éviter de nouvelles violences, promettant au surplus que ce mémoire ne contiendrait rien que des faits faciles à vérifier. Je fis ma commission à Capo d’Istria, et Capo d’Istria n’hésita pas à me répondre qu’il le recevrait volontiers. Bien plus, en ayant parlé à ses collègues, tous firent la même réponse.

Une vingtaine de ces opposants à la constitution fribourgeoise, recrutés soit dans l’ancienne noblesse, soit dans les milieux patriotes, se sont rencontrés le 27 août et ont pris l’engagement de «s’aider réciproquement de leurs lumières, de leurs conseils et de leurs biens pour

1. Monod, op. cit., t. II, p. 285-286.

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atteindre le Bésultat désiré».1 Ils ont fait imprimer à Lausanne un mémoire sur leurs griefs intitulé «Exposé de la situation politique du peuple fribourgeois»,2 dans lequel ils regrettent, entre autres, que seuls Fribourg et Berne n’aient pas répondu à l’attente des ministres et refusent d’appliquer les principes libéraux.

Cependant l’espoir d’un changement a toujours jusqu’ici entretenu la patience et nourri la modération. Cet espoir s’est fortifié encore, lorsque l’on fut informé que le Gouvernement de Soleur était obligé de renoncer à son système d’exclusion et de reconnaître par une nouvelle constitution, l’égalité des droits politiques, et que cette heureuse mutation dans l’état du peuple Soleurois était l’effet d’une coopération efficace de la part des Ministres des Hautes Puissances; la même perspective sembloit venir à la rencontre des désirs des Fribourgeois.

Reprenons le récit de Monod:3

Sur cette assurance, les mêmes personnes qui étaient venues chez moi se rendirent à Zurich, y présentèrent elles-mêmes leur mémoire, et y furent accueillies. Elles s’en retournaient pleines d’espérance, lorsqu’elles apprirent à Aarau qu’on devait les arrêter à leur retour dans leur canton. Inquiètes, elles rétrogradent et obtiennent des lettres pour leur gouvernement de Capo d’Istria et de Canning. Ces ministres observaient qu’en s’adressant à eux pour présenter des remarques sur la constitution projetée, on n’avait fait qu’user d’un droit que donnait la proclamation même de Fribourg du 14 janvier précédent; que d’ailleurs les ministres des Alliés étaient singulièrement chargés de travailler à arranger les affaires de la Suisse et que, pour y parvenir, ils devaient entendre tous les partis. Ils écrivirent de plus à Schraut, qui était à Berne et qui envoya aussitôt un sauf-conduit à ces trois Fribourgeois. Munis de ces pièces, ces derniers partent avec assurance et sont arrêtés à la porte même de Berne, où était l’envoyé à la signature duquel ils s’étaient fiés.

L’entrevue entre Capodistrias et les Fribourgeois Blanc, Praroman et l’avocat Chappuis est racontée par ce dernier au cours de sa défense lors du procès:4

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman, Duc et Consorts, no 8. L’original du document avec les signatures figure dans les pièces à conviction.

2. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman..., no 46, imprimé en français, p. 2.

3. Monod, op. cit., p. 286-287.

4. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman..., Défense de Chappuis, ff. 1.4 et 2.1.

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Vint le voyage de Zurich, voyage sans préparatif, sans appareil, executé dans le silence, comme dans des intentions de Paix. Le Ministre de Russie en avoit été prévenu, et c’est sur son invitation que l’on se mit en route. A Zurich nous eûmes la délicatesse de lui demander, avant d’entrer en matière, si la Constitution de Fribourg avoit l’assentiment des Ministres des Hautes Puissances, et si, à défaut de cette sanction, on pouvoit espérer quelques changemens estimés utiles, ou même nécessaires. Il nous répondit qu’il recevroit volontiers des explications, et que même il les attendoit.

Nous lui présentâmes en conséquence l’exposé, que j’avois rédigé d’après nos vues communes; nous l’avions fait imprimer, parce que des personnes de poids nous l’avoient conseillé, et parce que nous pensions qu’un imprimé seroit lu avec plus d’attention qu’un manuscrit, mais, tout en consentant à l’impression, j’avois formellement réservé, qu’il n’en seroit point distribué dans le public, et recommandé même toutes les précautions nécessaires, pour l’éviter.

Mr Capo d’Istria nous remit à une nouvelle audience, dans l’intervalle il nous envoya deux exemplaires de la Constitution de Fribourg, en nous invitant à lui remettre à ce sujet des observations par écrit, nous les rédigeâmes en commun, et les lui présentâmes.

Dans une troisième audience il nous dit: le Mémoire est bien, les observations sont biens, mais je vous invite encore à me donner par écrit les moyens d’opérer les rectifications nécessaires. C’est lui même qui, dans cette occasion, nous conseilla de demander 1° qu’il n’y ait point de différence de Bourgeoisie à Fribourg. 2° qu’il soit accordé à la campagne une représentation de la moitié, ouau moins du tiers, en nous observant que c’étoit ce qu’il avoit lui même demandé lors de son passage à Fribourg.

Lorsque nous primes congé, il nous remit une lettre pour Son Excellence Werro, après nous l’avoir lue, en nous chargeant de la remettre à la Poste. Cette lettre renferme l’apologie de notre conduite. Il nous en remit aussi une pour Son Excellence Mr le Baron de Schraut en nous recommandant de la lui apporter nous mêmes, et de conferer avec lui sur son contenu. Mr Strafford Canning Ministre de Sa Majesté Britannique, nous en remit aussi une à la même adresse et pour le même but.

La lettre à de Werro est datée du 24 septembre et les Fribourgeois ont probablement pris congé ce jour-là de Capodistrias, soit deux jours avant son départ à Vienne. Nous en connaissons le contenu grâce à une copie envoyée par de Krüdener au baron Griset de Forell en date du 11 décembre 1814, pour servir à la défense de Praroman.1 La voici:

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Dossier Procès Praroman..., 1814.

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Copie Son Excellence Mr le Comte de Capod’istria à Mr l’avoyer Werro. 24 7bre 1814.

Monsieur l’Avoyer!

Vos compatriotes Mrs de Praromann, Blanc ancien Conseiller d’Etat, et Chapuis, sont venus à Zurich pour communiquer à moi, ainsi qu’à mes collègues les observations qu’ils croyent devoir faire à la nouvelle constitution, de votre Canton qui vient de paroitre.

Comme cette demarche pourroit être envisagée, par quelques Intolerents, sous un faux Jour, et d’une manière peu favorable, à ceux qui s’en sont chargés, je crois dans mon particulier devoir donner à V.E. quelques éclaircissements, qui tranquilliseront, j’espère toutes les consciences.

Tout Citoyen de Fribourg à le droit de se demander d’après vôtre proclamation du 14e Janvier, si la nouvelle constitution est conforme aux vues libérales, annoncées par les Ministres alliés, dans les communications, qu’ils vous ont faites, relativement à la réorganisation de votre République, et s’il ne peut pas se répondre d’une manière satisfaisante, il a nécessairement le droit d’aller à la source et d’y chercher les notions les plus positives, pour connoitre d’une manière incontestable la decision de Son Sort.

Votre Gouvernement, ne peut donc pas réprouver une Demarche aussi conséquente, et aussi légitime. Je puis vous dire plus, Mr l’Avoyer, il doit même savoir gré à des Citoyens, qui ayant surtout à cœur l’honneur et la Gloire de leur patrie, plutôt que des Interrets personnels, commencent par obéir, avec la plus grande résignation, aux Autorités constituées de leur Pays, et se permettent seulement de faire des ouvertures aux Ministres, dont le but ne peut dans aucun cas, qu’être salutaires au repos et au bonnheur du Canton.

Vous aurez en tems et lieux la conviction la plus satisfaisante, de ce que j’ai l’honneur de vous dire, en attendant ayant tout lieu de croire que V.E. partage mon opinion, au sujet de Ses Compatriotes qui se sont rendus à Zurich, je me dispense de les recommander à Ses bontés.

Je pars dans deux jours pour Vienne ou S.M. l’Empereur a daigné m’appeller auprès de Sa personne auguste.

Je désire cependant que V.E. fasse parvenir à Mr le Baron de Krudner qui reste ici, un mot qui annonce la réception de la présente.

Je pris S.E. etc.

Seulement, entre-temps, on avait arrêté à Berne un étudiant du nom de Frossard qui transportait des lettres compromettantes de Duc à Monod et à des amis à Vienne. Une lettre figurant dans les archives Diesbach, datée de Vienne, le 19 octobre 1814,1 d’un auteur non iden-

1. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach.

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tifié mais partisan des libéraux (peut-être Joseph Vernazza), précise même: «Frossard a été arrêté à Berne, Ses papiers ont été examinés et saisis avec les dépêches dont il était chargé pour le ministre de Russie et le Conseiller Laharpe. C’est un affront qu’ils n’oublieront pas de sitôt ni l’un ni l’autre. En attendant c’est sans doute ce qui a trahi Duc.»

Duc est arrêté le 2 octobre, Blanc, Praroman et Chappuis sont appréhendés le 3 par la police bernoise, sur leur chemin de retour, malgré la lettre de Capodistrias à de Werro et le sauf-conduit de Schraut, et ils seront remis par la suite aux autorités fribourgeoises.

Dès leur arrestation, l’affaire prend la tournure d’un incident diplomatique. Le jour même, Schraut adresse une note indignée à l’avoyer de Watteville:1

Il espère encore que cette arrestation n’est que l’effet d’un malentendu, très extraordinaire assurément, mais qui pourrait toutefois être susceptible d’une explication adoucissante. S’il en était autrement, il a l’honneur de prévenir Monsieur l’Avoyer en charge et le Conseil secret, que les suites d’une telle mesure, si on ne la retire pas incessamment, ne pourront être que très fâcheuses, et pour le gouvernement de Fribourg qui semble l’avoir provoquée, et pour le gouvernement de Berne qui aurait cru devoir s’y prêter.

Le surlendemain, il se fait plus pressant encore:2

[...] si d’ici au 8 ils ne lui font pas représenter par le chef de la police les trois particuliers, désignés dans sa note précédente, il se verra forcé, bien malgré lui, de rompre toute communication avec le gouvernement de ce canton et de quitter immédiatement son territoire; il ne pourra pas continuer sa résidence dans un pays où l’on ose entraver ses communications, intercepter les personnes qui lui sont adressées par Messieurs les Ministres de Russie et d’Angleterre, ses collègues, dans l’importante négociation dont ils se trouvent chargés en commun, rejeter sans égard son passeport et son sauf-conduit les plus formels, le tout sous les prétextes les plus inadmissibles.

Et le 5 octobre, il envoie à l’ancien avoyer de Diesbach, gendre de Praroman, un message rassurant.3

Le 10 octobre, Canning décide de s’adresser directement à l’avoyer

1. Abschied 1814-1815, t. II, p. 21.

2. ibidem, t. II, p. 22.

3. ARCHIVES CANTONALES, Fribourg, Archives Diesbach, lettre de Schraut au baron de Diesbach, Berne, 5 octobre 1814.

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    L’affaire est discutée par le Petit Conseil vaudois dans sa séance du 15 août; au cours des jours suivants, il est décidé d’accepter la proposition, pour autant que l’Argovie y soit aussi partie prenante. On se met d’accord sur le nombre des délégués (deux par canton), sur le lieu (Morat), sur la date (le 2 septembre), les Vaudois insistant pour que les pourparlers aient lieu avant la reprise des travaux de la Diète.1

    Les résultats des entretiens seront très décevants. Si les députés bernois, Graf et Zeerleder, se montrent parfaitement courtois, les instructions qu’ils tiennent de leur gouvernement ignorent les Argoviens et ne comportent qu’une série de revendications financières très abusives à l’égard du canton de Vaud. Conférence qui apparemment se solde par un échec, mais qui a tout de même eu le mérite de mettre en présence les parties adverses.

    La Harpe à Zurich

    A peine arrivé à Lausanne, Monod est rappelé par Reinhard à Zurich pour participer dès le 1er septembre aux travaux de la commission diplomatique qui doit préparer les instructions à remettre aux députés à Vienne. Cela lui permet de rencontrer La Harpe, chargé de défendre au Congrès les intérêts des Vaudois et des Tessinois, qui fait halte pour quelques jours à Zurich. Sa présence dans les coulisses de la Diète contrarie fort quelques ministres. Dans son rapport à Metternich du 15 septembre,2 Schraut déplore sa présence et celle de Rengger, anciens ministres de la République helvétique, au moment où la Diète doit se prononcer sur le Pacte fédéral. La Harpe suit de près ce qui se fait à la Diète «et toujours dans la plus étroite accointance avec les Vaudois et les Argoviens dont l’animosité contre Berne approche du délire». Et plus loin: «Il tourna en tout sens pour m’engager d’entrer avec lui dans la discussion de la contreverse entre ces trois Cantons, me disant que dans sa qualité de Vaudois, il ne pouvait faire moins, que de tâcher de rendre service à son pays; il voulut que je le chargeasse de quelque Commission pour Vienne, de quelque lettre pour Votre Altesse, ajoutant que Mr Rengger, auquel il était attaché d’ancienne amitié, ferait avec lui ce voyage. Je l’ai comblé de politesses jusqu’à son départ, sans entrer avec lui sur aucune

    1. L’ensemble des documents vaudois sur cette conférence sont publiés dans Monod, op. cit., t. II, p. 406-424. Les documents argoviens sont groupés auxar chives d’Etat d’Aarau, dans AA2 Mappe P, no 18.

    2. ARCHIVES D’ÉTAT DE VIENNE, Schweiz. Berichte, fasc. 248, n° 112 (= AEG ms hist. 46, f. 360), rapport de Schraut à Metternich du 15 septembre 1814.